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sábado, 30 de agosto de 2025

Morreu o compositor russo Rodion Shchedrin, considerado "um génio contemporâneo". Tinha 92 anos

Músico foi descrito como “um fenómeno único e toda uma época na vida da cultura musical mundial” pelo Teatro Bolshoi. 


O famoso compositor russo Rodion Shchedrin, autor de ‘ballets’ mundialmente conhecidos, morreu durante a noite aos 92 anos, anunciou na manhã desta sexta-feira, 29 de agosto, o Teatro Bolshoi de Moscovo.

Um dos maiores génios contemporâneos”, cujas “óperas, ‘ballets’ e sinfonias são apresentados há várias décadas nos maiores palcos do mundo”, morreu durante a noite, informou o Bolshoi em comunicado.

Descrevendo Rodion Shchedrin como “um fenómeno único e toda uma época na vida da cultura musical mundial”, o comunicado lamenta a “enorme tragédia” e a “perda irreparável” para o mundo artístico.

Nascido a 16 de dezembro de 1932 em Moscovo, o compositor tornou-se conhecido no Ocidente com “Carmen Suite”, uma música para ‘ballet’ escrita em 1967 que fez brilhar a sua mulher, a bailarina russa Maia Plissetskaya, no palco do Bolshoi.

Consagrada pelo Bolshoi como ‘prima ballerina assoluta’, Maia Plissetskaya morreu em 2015.

Inspirando-se em contos de fadas e na literatura clássica russa, Shchedrin também compôs os ‘ballets’ “O Pequeno Cavalo Corcunda”, “Anna Karenina” (baseado em Leo Tolstói) e “A Gaivota” (baseado em Anton Tchekhov).

Autor da ópera “Lolita”, composta a partir do controverso romance de Nabokov e cuja estreia mundial ocorreu em 1994 em Estocolmo, também se destacou pelas suas sinfonias e concertos para piano e orquestra, interpretados tanto na Europa como na Ásia e nos Estados Unidos.

Com mais de 80 obras no total, “o inestimável legado artístico de Shchedrin continua a encontrar eco nos corações do público”, sublinha o Bolshoi.

 

[Foto: Kremlin- fonte: www.dn.pt]

sábado, 8 de março de 2025

«Relats de Sant Petersburg», recull d'històries de Nikolai Gógol


Un nas que cobra vida. Un funcionari senzill la possessió més preuada del qual és un abric. Un home que perd lentament la raó. Aquestes són algunes de les històries d'’aquesta compilació, una selecció dels cinc millors relats de Nikolai Gógol ambientats a Sant Petersburg. A cadascun hi descobrim una cara diferent de l’'aleshores capital de l’Imperi Rus.

'Els Relats de Sant Petersburg' són la introducció perfecta a Nikolai Gógol, un dels autors més destacats en llengua russa. Pioner del grotesc i amb un estil que combina sàtira, realisme i fantasia, ha inspirat autors posteriors com Fiódor Dostoievski, Anton Txékhov o Vladimir Nabokov. En aquest recull, crea un mosaic literari que captura la complexitat de la vida urbana i les relacions humanes a Sant Petersburg.

 

Biografia de l'autor

Nikolai Vassílievitx Gógol (Veliki Soròtxintsi, Imperi Rus, 1809 - Moscou, 1852) va ser un escriptor, dramaturg i poeta, conegut per les seves contribucions a la literatura del grotesc. De ben jove va traslladar-se a Sant Petersburg, la capital, on va treballar de funcionari. Allà va conèixer el cèlebre escriptor Aleksandr Puixkin, que el va ajudar en la seva vocació literària. La seva antologia de contes Vetlles en un veïnat de Didanka, inspirats en la vida dels camperols ucraïnesos, va marcar l’inici de la seva carrera. Les seves obres posteriors, entre les quals destaquen la peça teatral El revisor, la novel·la Les ànimes mortes o els Relats de Sant Petersburg, es caracteritzen per la seva incursió en l’absurd i la crítica a la burocràcia de l’Imperi. Va morir prematurament als 42 anys.

Títol: Relats de Sant Petersburg
Autor: 
Editorial: Clandestina Editorial
Pàgines: 230
ISBN: 978-8419627629

 

 

[Font: www.racocatala.cat]

quinta-feira, 30 de janeiro de 2025

Jean Blot, une traversée du siècle

Écrit par Kristian Feigelson 

Caroline Bérenger, spécialiste de la poésie russe du début du XXe siècle et notamment de Marina Tsvetaeva, nous offre une première biographie de Jean Blot (1923-2019). Fidèle à l’esprit de l’auteur, elle part d’ailleurs de ses propos : « Je voudrais que ma biographie soit l’histoire d’une pensée aussi inachevée et contradictoire qu’elle soit. » Pourtant, en écho à sa propre autobiographie romancée Le Séjour (Les Cosmopolites, 2019), Jean Blot affichait lui-même sa méfiance vis-à-vis de ce type de projet : « Je déteste la vérité. Elle fait de tout un mensonge. » Un écrivain renvoie sans doute à toute une part de mystère. Aussi les archives compulsées comme les témoignages de cette personnalité hors du commun ne peuvent reconstituer tous les itinéraires mais contribuent aujourd’hui en grande partie à éclairer cette traversée du XXe siècle. 

Ce travail en profondeur combine à la fois l’enquête d’archives écrites conservées à l’IMEC (Blot les y déposé de son vivant, dès 2010) avec l’enquête orale : elle avait pu rencontrer Jean Blot juste avant sa disparition en 2019. Sa connaissance intime de la littérature russe comme de l’œuvre de Jean Blot lui permet aussi de nous proposer une sorte « biographie rêvée », sous forme d’un essai quasi littéraire comme l’indique le sous-titre : « Dans les labyrinthes de la littérature ». Sa biographe a le souci constant de référer directement aux différents textes de l’écrivain, donnant au lecteur l’envie de redécouvrir une œuvre toujours disponible aujourd’hui dans sa quasi-intégralité : une vingtaine de romans et récits publiés en partie chez Gallimard et une vingtaine de récits de voyages comme d’essais et de biographies consacrées entre autres à Marguerite Yourcenar ou Albert Cohen. En fin de compte, cette biographie inventive permet de redonner vie tant à un destin d’écrivain hors norme qu’à une figure un peu oubliée de la littérature. Elle éclaire les moments les plus parlants de la vie de Jean Blot, décrite sous différents aspects, dans un cahier iconographique indexé au milieu du livre, témoignant de la vie de ses parents en Russie impériale avant leur fuite en Allemagne lors de la NEP, puis de ses différents épisodes de vie à Paris avant-guerre, de la résistance FFI aux périodes aux Nations-Unies à New York après 1946 et enfin lors de sa vice-présidence du Pen Club international dans les années 1990. 

Exilé, réfugié, voyageur, figure cosmopolite, résistant, diplomate et interprète, Jean Blota été en son temps un écrivain reconnu. Son destin hors du commun commence en URSS dans un exil qui le conduit enfant de Moscou à Paris comme des milliers d’exilés de cette époque. Scolarisé en Angleterre puis en France, réfugié à Dinard au moment de l’occupation et manquant d’être arrêté en 1941, il s’engage très jeune dans l’Armée secrète auprès du général de Gaulle, participant ensuite à la libération de Lyon comme lieutenant en 1944. Après la guerre, il entame et soutient un doctorat en lettres puis une thèse sur la Corée où il séjourna, avant de devenir interprète de russe aux Nations-Unies à New York (1946-1961) puis diplomate en poste à l’Unesco à Paris (1962-1981). Secrétaire international du Pen Club de 1981 à 1997, il s’attache à défendre la littérature dissidente d’Europe centrale et d’URSS. En 1998 il devient vice-président international du Pen Club français.   

Se faire un nom

Jean Blot cachait un Aleksandr Blokh, prénommé ainsi à sa naissance à Moscou par ses parents férus de poésie russe et sensibles à la quasi-homonymie avec Alexandre Blok, figure de l’Âge d’Argent et auteur du célèbre poème Les Douze. Jean Blot lui consacra d’ailleurs un ouvrage : Alexandre Blok. Le poète de la perspective Nevski (Éditions du Rocher, 2007). La culture russe et sa littérature hantèrent l’œuvre de Jean Blot pour devenir le fil rouge d’une partie de ses réflexions. Outre plusieurs textes consacrés à Saint-Pétersbourg, on trouve en effet dans son œuvre des études sur Ivan Goncharov et le réalisme russe (L’Age d’Homme, 1985), sur le poète Ossip Mandelstam (Seghers, 1972) disparu dans les camps sibériens en 1938 ou encore un essai sur Vladimir Nabokov (Seuil, 1995) autre figure de l’exil, qui avait renoncé finalement après ses œuvres de jeunesse à s’adresser à ses compatriotes de l’émigration pour devenir un écrivain cosmopolite, nomade, et de langue anglaise. Sans doute Jean Blot dans ses parcours multiples s’identifie-t-il à ces auteurs. 

Comme le rappelle dans sa préface François Bordes, quand Jean Blot rencontra Jean Paulhan chez Gallimard, ce dernier, en commentant ses origines, plaisanta : « Aleksandr Blokh… frise l’abus de confiance ». Albert Camus, croisé à la sortie de chez Gallimard, rassura Jean Blot en lui suggérant un nouveau patronyme. Il avait déjà changé de nom en basculant dans la clandestinité en 1942. C’est ainsi qu’Aleksandr Blokh redevient Jean Blot, et que le jeune auteur, rapidement, illustre le nom qu’il s’est choisi[1]. L’écrivain semble toujours apparaître là où on ne l’attendait pas et sous des identités multiples. Il fut très tôt un résistant actif et vit sa prime jeunesse à une époque où un grand nombre se parait de fausses identités pour survivre, de surcroît lorsque votre nom à la consonance juive ou étrangère pouvait vous conduire directement aux camps de la mort. Dans un roman paru en 1985, Tout l’été (Albin Michel), il revient sur cet engagement dans la résistance qui touche à son identité profonde dans une France hostile : « On ne saisissait ni le sens du mot russe, ni celui du mot juif : Russe, juif ? C’étaient deux mystères. »  Comme le commente justement Victoire Feuillebois, spécialiste de littérature russe à l’université de Strasbourg : « Se rebaptiser « Jean Blot » signe l’acte de naissance de l’écrivain, et signale aussi la bifurcation du destin de l’exilé russe d’à peine plus de vingt ans : s’émancipant de ses racines, le jeune homme embrasse la carrière d’un écrivain sans frontières. [2]» Dans les années 1950 de l’après-guerre, Jean Blot adopte ce patronyme d’écrivain se donnant une nouvelle identité à l’image un peu de Roman Gary, lui aussi d’origine juive russe et au parcours parfois semblable mais tout aussi tumultueux d’écrivain-diplomate. Un des succès littéraires de Jean Blot, Moi, Graf Bouby, chat de gouttière (Balland,1984), relatait les aventures d’un chat capable de rebondir sur les toits de New York.  

Vivre en littérature?  

Jean Blot n’a pas été seulement auteur prolifique de romans, de récits de voyage et d’essais pour devenir peu à peu une figure quasi incontournable de la vie littéraire du second XXe siècle en produisant une œuvre fictionnelle un peu oubliée aujourd’hui. Caroline Bérenger écrit qu’il a été une sorte de « serviteur de la littérature » la transformant en véritable réseau collectif pour animer des salons littéraires où se croisait chez lui toute une élite cosmopolite. Témoin de son siècle mais aussi grand voyageur de par le monde, Jean Blot fréquenta nombre d’écrivains reconnus d’Albert Cohen à Lawrence Durrell ou encore György Konrád. On regrettera ici de ne pas en apprendre davantage sur d’autres liens ou influences hérités de cette diaspora russe ou juive russe en France qui, dans l’entre-deux-guerres, produisit d’importants écrivains dont certains furent reconnus très tardivement, comme Irène Némirovsky, déportée en 1942, ou Nina Berberova, qui vécut à Paris (1925-1950) avant de partir vers les États-Unis.  

Les années de guerre froide vont être un tournant essentiel dans la volonté plus politique de Jean Blot de ne plus être seulement un passeur de la littérature russe mais aussi de devoir la défendre. À la fin des années 1950, il retrouve ses racines russes à Moscou lors de premiers courts séjours, avant de découvrir l’Ukraine à Kiev et Odessa (d’où provenait aussi une partie de sa famille). Il évoquera ces séjours dans Le Soleil se couche à l’Est (Éditions du Rocher, 2005) où il pointe déjà la vitalité de la culture ukrainienne.  

Ces voyages lui permettent de rencontrer des écrivaines russes majeures sous le boisseau comme Anna Akhmatova et Lydia Tchoukovskaïa, mais aussi de témoigner de la chape de plomb pour soutenir la dissidence littéraire soviétique lors des procès Brodski en 1964 puis Siniavski / Daniel en 1966. La revue Preuves (1951-1974), à laquelle il a appartenu autour de Raymond Aron, devient le carrefour de sa réflexion anti-totalitaire, et dans les années 1960 il y témoigne de son expérience du socialisme réel[3]. Associé successivement aux travaux du club Jean Moulin puis à la revue Esprit comme à la NRF, soutenant Michel Rocard à l’élection présidentielle de 1969, il appuie par la suite le projet de « Nouvelle Société » de Jacques Chaban-Delmas insufflé par Jacques Delors. De 1999 à 2005, succédant au poète Pierre Emmanuel, il occupe la présidence du Pen Club français. Cette nouvelle période féconde d’activités et de voyages lui permet d’apporter une dimension plus européenne au Pen Club en faveur d’écrivains persécutés dans le monde. Jusqu’à sa disparition en 2019, Jean Blot aura à la fois traversé tout le XXe siècle et ses principaux drames tout en s’engageant activement dans son époque. Jean Blot concluait dans un ouvrage dédié à Mozart : « Une vie ? C’est une énigme. Elle doit le rester. On ne peut la résoudre. Seulement la décrire.[4] » La biographie de Caroline Bérenger va donc bien au-delà de ces propos en nous restituant tout son contexte. Par son histoire, Jean Blot a eu l’ambition de devenir le plus français des écrivains d’origine russe jusqu’à en brouiller les pistes comme les origines.

 

Caroline Bérenger, Jean Blot, dans les labyrinthes de la littérature, préface de François Bordes, Paris, éditions de Corlevour,  2023, 191 p.

 

[Source : www.telos-eu.com]

quinta-feira, 9 de maio de 2024

Inédit de Vladimir Nabokov : dans les coulisses d'une traduction

Le grand public connaît Vladimir Nabokov à travers son chef d'œuvre Lolita, deux fois adapté au cinéma, les plus curieux ses autres textes importants de la période américaine comme Feu pâle. Beaucoup moins ont lu ses œuvres écrites en russe. Dans ces dernières, qui s'étendent jusqu'aux 40 ans de l'écrivain tout de même, encore un certain nombre d'inédits en français, principalement du côté de sa production dramatique. Les éditions Verdier publient ce 25 avril l'une d'elles : « Un chef-d'œuvre de sa jeunesse » même, selon les traductrices, et pour le poète-prosateur hors-norme, ce n'est pas peu dire...



Publié par Hocine Bouhadjera


« Morn : […] Viens-tu de loin, invité ténébreux ? L’Étranger : De l’existence ordinaire, d’un réel fait de grisaille… Je dors… Tout cela n’est qu’un rêve… Le rêve d’un poète ivre… Un rêve qui se répète… » On dirait du Shakespeare de La Tempête ou des comédies...

En 2009, la publication du dernier roman, inachevé, de Vladimir Nabokov, L'Original de Laura, sur décision de son fils Dmitri, avait créé une polémique éthique : peut-on publier un manuscrit malgré les volontés de l'auteur qu’il soit détruit ? Rien de tout cela cette fois, puisque cette pièce, La Tragédie de Monsieur Morn, est une œuvre achevée du Russo-Américain, mais là aussi non publiée de son vivant, ni jouée, « si l’on excepte les quelques lectures dans le cercle de Youli Aïkhenvald, critique littéraire et personnalité éminente de la première vague de l’émigration russe ».

Un projet ancien

Sophie Bernard-Léger, docteure en Études slaves et l’une des deux traductrices, a eu vent de la pièce à l'occasion de sa traduction en anglais en 2013, par Anastasia Tolstoy et Thomas Karshan. L'idée d'une version pour la France germe dans son esprit. Quelques années plus tard, à la faveur du colloque sur « Nabokov et le cinéma », celle qui vit aujourd’hui à Florence propose à Daria Sinichkina, maîtresse de conférences en littérature russe à Sorbonne Université, et coorganisatrice de l'événement avec Sophie Bernard-Léger, de devenir sa partenaire de traduction.

Une mise en commun de leur deux forces pour relever un défi : traduire ce texte exigeant dans sa dimension poétique, comme toute l'œuvre du maître russe naturalisé américain. Un premier extrait de leur travail est partagé dans le Cahier de l'Herne Nabokov, paru en octobre dernier, prélude à la publication de la pièce en intégralité, ce 25 avril.

Vu la dimension d'un Nabokov, comment cette œuvre, qui se révèle par sa lecture d'un intérêt majeur, a-t-elle pu passer sous les radars un si long moment ? « Longtemps, ce texte n'était connu que dans une version incomplète, liée à l'histoire matérielle de la littérature russe à l'époque soviétique, exhumée des archives à la chute de l'URSS », nous raconte Daria Sinichkina.

La pièce de Nabokov n'a été présentée en Russie qu'en 1997, publiée par Serena Vitale et Ellendea Proffer dans le quatrième numéro de la revue littéraire Zvezda. Une publication incomplète, car elle excluait plusieurs sections du cinquième acte. En 2008, le texte est reconstitué à partir de divers fonds d'archives. Une version toujours pas complète, certains extraits semblant irrémédiablement perdus...

« Un texte qui incarne la fusion de l'histoire et de la poésie, typique de l'œuvre de Nabokov », ajoute la maîtresse de conférence. Luba Jurgenson, qui porte la collection qui accueille l'inédit, abonde dans son sens : « Ce texte, qui met en scène une société utopique aux accents totalitaires, s'intègre parfaitement dans l'orientation de notre collection, qui vise à explorer l'histoire du XXe siècle à travers la littérature, d'accéder à cette histoire de manière littéraire. »

La mort du père

Cette pièce, il la composa durant la période de son exil berlinois, mais l'écriture se fit principalement à Prague, où il avait rejoint sa mère, durant l’hiver 1923-1924. Il était alors au milieu de sa vingtaine, et signait encore sous le nom de Sirine.

L'enfance de Vladimir Nabokov se déplie dans la grande demeure familiale de la Saint-Pétersbourg pré-révolutionnaire. Il grandit entouré de livres, maîtrise l'anglais et le français très tôt, se révèle, tout aussi précocement, être un enfant génial. De premières années dorées et libérales, bientôt assombries par les nuages de la révolution de 1917, qui poussent la famille Nabokov à fuir vers l'ouest. L'écrivain, plus tard, ne regrettera pas les larges pertes matérielles, mais la jeunesse bénie.

Malgré sa tonalité parodique, typique de Nabokov, la pièce constitue une véritable tragédie, comme son nom l'indique d'ailleurs. Elle résonne comme un écho douloureux à un drame personnel — l'assassinat du père de l’écrivain en mars 1922. Ce dernier s'était interposé, à Berlin, pour protéger le leader politique Pavel Miliukov contre une tentative d'assassinat par des monarchistes russes exilés. En tentant de maîtriser l'assaillant, il a été mortellement touché par deux balles.

Les années 20-30 de « Vladimir Sirine » - en référence aux mythiques sirènes et leurs chants profonds, mystérieux et mortels -, sont largement celles de la poésie, des nouvelles, de la critique littéraire et du théâtre. Le jeune virtuose se fait rapidement connaître dans la diaspora russe culturelle, leur parle d’exil, de nostalgie, d’identité fragmentée.

La Tragédie de Monsieur Morn se déroule dans un pays fictif, dans lequel un roi anonyme monte sur le trône à la suite d'une guerre civile. Le visage et l'identité de celui qui se consacre au développement de la culture, des sciences et des arts restent inconnus de tous. Son adversaire, « guide intellectuel des radicaux », aspire à prendre sa revanche... Parallèlement, un ex-rebelle de retour d’exil apprend que sa femme est tombée amoureuse d'un homme nommé Monsieur Morn...

« La violence est présente dans la crise politique qui s’abat sur la ville en proie à un coup d’État survenu hors de la scène un peu avant l’acte IV, tandis que les nuances du sentiment amoureux sont explorées dans les couples Midia-Morn et Ella-Ganus », décrivent les deux traductrices dans leur introduction.

Un travail à quatre mains

Bien que souvent perçu comme un écrivain de « l'art pour l'art », anti-psychologique, Vladimir Nabokov a abordé la politique à travers la peinture d'univers totalitaires dans certains de ses textes, tels que la pièce L’Homme de l’URSS (1927) et les romans L’Invitation au supplice (1938) et Brisure à senestre (1947). L'homme de finesse extraordinaire fut néanmoins, avant tout, un poète, même dans la prose, comme Flaubert dans Madame Bovary, Marcel Proust dans La Recherche ou Shakespeare dans son théâtre.

« Le projet de traduction auquel nous nous sommes attelées était particulièrement complexe, nécessitant une approche minutieuse pour restituer la qualité poétique de l'original, écrit en pentamètres iambiques blancs non rimés », présente Daria Sinichkina, avant de développer : « Dans notre traduction, nous avons donné la préférence au décasyllabe car notre objectif a été de conserver, dans le texte français, l’aisance orale d’un texte qui est écrit pour être joué sur scène, tout en restant un drame en vers. Nabokov emprunte le pentamètre iambique blanc à la pièce d’Alexandre Pouchkine Boris Godounov, inspirée à son tour de Shakespeare. Nous avons aussi voulu établir un lien implicite entre le décasyllabe choisi par André Markowicz dans sa dernière traduction de Boris Godounov en français, un certain nombre de traductions de Shakespeare qui privilégient aussi ce mètre, et la pièce de Nabokov. »

Nabokov joue ici avec la forme classique pour la subvertir, et mélange les registres, combinant parodie, humour et une diversité de personnages aux noms qui rappellent, là-encore, ceux du dramaturge anglais. À l'instar de Boris Godounov encore, il fait des allusions plus ou moins voilées à des événements contemporains, dans ce cas précis l'abdication du tsar Nicolas II et le coup d’État bolchevique qui mène aux années de terreur. Une riche intertextualité donc, « l’un des traits dominants de l’esthétique nabokovienne », qui déborde aussi du côté de Hugo, de Musset, Alexandre Blok ou encore Mikhaïl Lermontov. Pour le plus grand plaisir de nos amis universitaires.

Un travail de traduction qui a nécessité plusieurs étapes et versions, pour transposer cette histoire et sa métrique au français. Un choix non rigidement strict dans le décasyllabe finalement, afin de permettre des variations, et mieux s'accorder au dialogue et à l'intensité des tirades, témoignage de cette partition à quatre mains

Daria Sinichkina, habituée de la langue poétique russe, s’est d’abord penchée sur les longues tirades, tandis que Sophie Bernard-Léger s'est davantage concentrée sur les dialogues, afin de les rendre vivants. Le duo nous raconte : « Nous avons adapté une méthode de collaboration où chacune passait et repassait sur le travail de l'autre. Cette approche a non seulement permis de peaufiner le texte mais aussi de tester différentes formulations et de discuter de certains termes spécifiques. Cette interaction a également donné lieu à des moments de rire et des souvenirs précieux. » 

Encouragées par cette expérience positive, elles espèrent aujourd'hui continuer à traduire ensemble d'autres pièces de Nabokov, comme sa poésie, car oui, il reste beaucoup d’inédits dans la langue de Molière. Les traductrices évoquent « un vaste continent peu exploré ». 

Au sujet de La Tragédie de Monsieur Morn, Sophie Bernard-Léger parle « d'un chef-d'œuvre de jeunesse », de celui qui changea de langue à 40 ans sans perdre de sa force, bien au contraire, cas unique pour un écrivain de cette dimension. Son éducation à l'Université de Cambridge avait tout de même affiné son art de la prose anglaise, qu'il maîtrisa avec une précision et une inventivité qui éclipsent bien souvent ses pairs natifs.

Une maison russophile

La maison d'édition Verdier ne possède pas une, mais deux collections russes. Celle qui accueille cet inédit, « Poustiaki », est codirigée par Luba Jurgenson et Anne Coldefy-Faucard. Son nom, qui signifie Les petits riens, est une référence à l'ouvrage autobiographique d'Iouri Annenkov, De petits riens sans importance, réédité en 2018 dans une traduction d'Anne Coldefy-Faucard. 

« Cette collection se focalise sur des textes qui offrent une perspective intime sur des événements historiques majeurs comme la Révolution russe, la Première Guerre mondiale, et la guerre civile russe », décrit Luba Jurgenson, et de continuer : « Ces récits ne cherchent pas à présenter de grands essais historiques mais à dévoiler les subtilités de la vie quotidienne durant ces périodes tumultueuses, explorant l'histoire à travers "le trou de la serrure". » À côté de Vladimir Nabokov, des auteurs comme Evgueni Zamiatine, Vladimir Sorokine ou encore Sergueï Lebedev. 

La seconde collection, « Slovo », « Verbe » en russe, se concentre sur des œuvres qui mettent en lumière la puissance et la portée de la langue russe à travers des textes significatifs, comme ceux de Varlam Chalamov, Daniil Harms ou notre contemporain Maxime Ossipov. Elle a été fondée par Hélène Châtelain, et est actuellement dirigée par Catherine Perrel.


[Source : www.actualitte.com]



sábado, 6 de janeiro de 2024

Delmore Schwartz i altres escriptors inspiradors de Lou Reed

The Velvet Underground, etc. (Cúpula) el periodista Rafa Cervera revela els gustos literaris de Lou Reed, des dels autors beat fins al seu professor de literatura, Delmore Schwartz, del qual LaBreu edità el 2022 En els somnis comencen les responsabilitats.

Escrit per Àlex Milian

The Velvet Underground, etc. (Libros Cúpula), del periodista valencià Rafa Cervera, aprofundeix en aquest grup icònic per a la història de la música (segons el subtítol “El grupo que pervirtió la música rock”) i en les influències literàries del seu líder, Lou Reed (que ací apareix, en la seua etapa juvenil, com a Lewis).

Cervera explica que Reed va convertir un dels professors de la Universitat de Siracusa en “una mena de figura paterna”. Qui el va captivar va ser Delmore Schwartz, escriptor que va arribar a aquell centre “en hores baixes degut a les paranoies que la beguda fomentava al seu cap”, però que havia signat un recull de contes que havia impactat l’autor de Lolita: “El mateix Nabokov havia elogiat En els somnis comencen les responsabilitats, la col·lecció de relats que va publicar el 1938, la qual situà a l’alçada d’obres de J. D. Salinger, John Cheever, John Updike i John Barth”.

Aquest recull de relats, En els somnis comencen les responsabilitats, està traduït al català per Andreu Gomila i va ser publicat per LaBreu Edicions l’any passat. Fins al 2022 només la revista Paper de vidre havia encarregat la traducció d’un dels contes a Dolors Udina.

A Schwartz, en Lou Reed “l’escoltava encisat mentre recitava passatges de Finnegan’s Wake [James Joyce], a l’Orange, el bar pròxim al campus de Siracusa, on es reunien els seus deixebles per debatre sobre literatura fora de les hores lectives”.

Però Cervera també explica altres escriptors de capçalera de Reed: “Llegia compulsivament autors beat —Ginsberg, Corso o Bukowski—, que, com [William] Burroughs, introduïen a les seues obres el consum de drogues i la pràctica d’una sexualitat que a voltes fugia del normatiu”.

Reed “s’havia proposat emprar la cançó pop com vehicle literari: per la brevetat i abast popular, considerava les cançons com contenidors perfectes de lírica”.

[Font: www.eltemps.cat]

sexta-feira, 15 de dezembro de 2023

Pódese amar a un monstro?

 

Dederer reflexiona sobre se é posible separar ao autor da súa obra, amar a un xenio pola súa arte á vez que o detestamos como persoa

                                Á esquerda, Pablo Picasso; amais, Roman Polanski e debaixo, Woody Allen. Tres figuras analizadas por Dederer

Escrito por ENRIQUE CLEMENTE

A polémica é recorrente: pódese admirar a un xenio perverso, a artistas cunha obra magnífica que son persoas detestables? A lista é ampla. Norman Mailer apuñalou á súa muller no estómago; Arthur Koestler era un borracho violador en serie; o premio Nobel V. S. Naipaul, ademais de racista, cruel e narcisista, era un sadomasoquista adicto a vexar ás mulleres; Heidegger foi un nazi recalcitrante; Célibe, antisemita; William Burroughs, un adicto á heroína e o alcol que matou á súa muller dun disparo xogando a Guillermo Tell; Simenon era antisemita, colaboracionista e adicto ao sexo...

A crítica de libros, ensaísta e xornalista Claire Dederer, colaboradora de The New York Times, aborda a cuestión desde unha perspectiva persoal en Monstros, que leva o significativo subtítulo de Pódese separar o autor da súa obra? O libro arrinca forte cun prólogo dedicado ao cineasta Roman Polanskiao que tacha de «xenio repugnante», e sobre o que conta como drogou e violou analmente a unha nena de 13 anos. «E, aínda así, a pesar de saber o que fixera Polanski, eu seguía gozando da súa obra. Moito», escribe. Dederer sinala que quería «ser unha consumidora con estándares morais, unha boa feminista de xeito demostrable e, ao mesmo tempo, unha cidadá do mundo da arte». Pero, cal era a forma correcta de actuar ante eses «dous imperativos idénticos e aparentemente contraditorios?».

«Eu sabía que Polanski era peor, signifique o que signifique iso. Pero Woody Allen era a persoa que suscitaba un maior debate interno entre o espectador medio», explica. «De mozo, eu sentíame como Woody Allen. Intuía ou cría que me representaba na pantalla. El era eu», relata. «Despois do de Son-Yi pasei a velo como un agresor. Deitarse coa filla da túa parella non é que sexa horrible, é que vai máis aló diso», asegura.

«Annie Hall é a mellor comedia do século XX. E debía renunciar a iso só porque Woody Allen actuase mal? Non me parecía xusto», afirma. A autora cre que «Manhattan e a súa alegación a favor das mozas e en contra das mulleres sería preocupante incluso se o furacán Son-Yi xamais tocase terra, pero non podemos sabelo, e ese é o miolo da cuestión».

Colección de clásicos

Dederer di que xenio «é o nome que lle damos (...) cando non queremos pedirlles contas aos nosos heroes». «Esa idea do xenio —prosegue— e do que se lle permite aplícaselle a determinadas persoas concretas. Unha pista: non son mulleres». «Musculosos, desenfreados, mullereiros, virís, coes, sexuais. A idea que temos hoxe do xenio artístico débelle moito a Picasso e a Hemingway», sinala. «Pero claro que Picasso era un parvo. Ao seu amante Françoise Gilot presuntamente díxolle: 'Para min, só hai dous tipos de mulleres: deusas e felpudos'». Aquelas a as que «utilizou na súa vida forman un montículo de carne, ata o punto que pode resultar difícil lembrar cal é cal». Mariana, a súa sobriña, escribiu: «Sometíaas á súa sexualidade animal, domábaas, enfeitizábaas, inxeríaas e espremíaas nos seus lenzos e, cando xa as deixou secas, despois de extraerlles as súas esencias noite tras noite, refugábaas».

«O nome de Hemingway é sinónimo de disputas, mulleres e violencia glamurosa; de peches de touros, de pescar peces moi grandes, de axexar leóns, de golpear a mulleres e nenos», asegura. Era «un matón, un abusón, un agresor verbal».

«A raíz do Me Too, emprendemos un experimento mental —ou talvez só foi cousa miña— no que intentamos imaxinar un mundo no que a masculinidade, a virilidade, a carta branca e a violencia non fosen necesarias para facer arte con maiúsculas», apunta. Para Dederer, Vladimir Nabokov é o antimonstro, a pesar de que Lolita «en si mesmo, vese como un acto de abuso». Segundo a ensaísta, Nabokov «estaba disposto a que o mundo pensase o peor del. Ao facelo —ao contar a peor historia e deixar que o mundo crese que tiña algo que ver con ela—, creou unha forma de que entendésemos, de que sentísemos, a enormidade que supón roubarlle a alguén a infancia».

«Que facemos coa arte dos homes monstruosos?», pregúntase ao final do libro. Aínda que, para ela, a pregunta verdadeiramente importante é «que facemos coas persoas monstruosas ás que queremos? Eliminámolas das nosas vidas Cancelámolas?». E a modo de conclusión: «Non queremos a quen o merece; queremos a seres humanos defectuosos e imperfectos».

 

[Fonte: www.lavozdegalicia.es]

domingo, 11 de junho de 2023

Pour comprendre ce qu'il y a dans le cœur des Russes, il faut lire Dostoïevski

 

[TRIBUNE] Le peuple russe, rendu fataliste par une histoire chaotique, consent à la tyrannie. Et cela, nul ouvrage ne permet mieux de le comprendre que «Souvenirs de la maison des morts».

Ce qui frappe, dans Souvenirs de la maison des morts, outre la précision extrême, le détachement émotionnel, c'est le consentement face à une situation inique. | В.Я. Лауфферт via Wikimedia Commons

Par Phénix 

De son voyage de trois ans en Russie, le marquis de Custine tire quelques années plus tard un essai, La Russie en 1839, mélange d'observations personnelles, de considérations politiques, institutionnelles et sociales. Le livre, interdit par la censure du tsar, connaît un grand succès et est souvent considéré comme le pendant de De la démocratie en Amérique d'Alexis de Tocqueville pour sa clairvoyance et son caractère visionnaire. Astolphe de Custine y décrit le régime comme une «monarchie absolue tempérée par l'assassinat»; sur ses sujets, il ajoute: «On peut dire des Russes, grands et petits, qu'ils sont ivres d'esclavage».

Quand Valeri Zaloujny, le chef d'état-major des armées ukrainiennes, déclare, dans une interview donnée à The Economist il y a quelques mois, «Un tsar leur dit de faire la guerre, et ils font la guerre», il ne dit rien de bien différent. Pas plus que Marina Ovsiannikova, la journaliste russe de la chaîne de télévision Channel One, rendue célèbre pour avoir interrompu l'antenne en brandissant une pancarte dénonçant le conflit et qui, plus tard, interrogée par Sky News sur la possibilité d'un soulèvement, répond: «Les Russes sont intimidés et il n'y a rien qui les motivera à aller manifester dans la rue. La police est partout, si vous relevez la tête, votre vie est finie.»

Depuis des siècles, l'Occident multiplie les mêmes clichés sur le pays-continent, entre tyrannie eurasiate, nouvel Eldorado et pays européen qui s'ignore. Mais la réalité est plus complexe. Il est faux de dire que les Russes sont condamnés à l'asservissement, de même qu'il est naïf d'attendre un soulèvement du peuple pour renverser le tyran.

L'histoire russe n'est pas que celle des guerres et des conquêtes, c'est aussi, surtout depuis deux siècles, celle d'un vaste mouvement de balancier oscillant entre réformes timides et contre-réformes brutales. Pour cela, il faut un peuple non pas «ivre d'esclavage», mais rendu fataliste par une histoire particulièrement chaotique, un peuple qui consent à une forme de tyrannie comme ferment de son originalité et de sa spécificité, un peuple ayant accepté une métaphysique du malheur. Or, nul ouvrage ne permet mieux de le comprendre que les Souvenirs de la maison des morts de Fiodor Dostoïevski.

Le cycle réforme-contre-réforme est une constante de l'histoire russe

Au début de son règne, Alexandre Ier (1801-1825) essaie de constitutionnaliser le gouvernement russe. Il offre au Sénat un droit de remontrance, s'appuie sur le conseil des ministres et le conseil d'État pour gouverner et s'attaque même, sans succès, à la réforme du servage. Puis, au fil des guerres et des conversions mystiques, il revient en arrière, renforçant entre autres la censure tandis que commence «l'âge d'or» de la littérature russe.

Son successeur, Nicolas Ier (1825-1855), devant faire face aux décembristes, entame un nouveau cycle de répression, de censure, de bannissement et d'élimination de toute forme d'opposition, tout en continuant à guerroyer sur tous les fronts comme son frère aîné.

Après sa mort en plein désastre de la guerre de Crimée, le nouveau tsar Alexandre II (1855-1881) entame une période de libéralisation: abolition du servage en 1861, réforme du système judiciaire, du système éducatif, de la censure, création des zemstvo (assemblées provinciales), etc., avant de prendre un tournant conservateur vers la fin de son règne et de finir assassiné sous les bombes des nihilistes.

Quand Alexandre III (1881-1894) accède au trône, il commence par créer l'Okhrana, la «première» police politique russe et le véritable ancêtre des services secrets, avant de mettre en place des contre-réformes qui reviennent sur les avancées de son père.

Puis, c'est le tour de Nicolas II (1894-1917), qui amorce le rapprochement avec la France –visite triomphale à Paris en 1896, inauguration du pont Alexandre III, etc. Sous l'impulsion des ministres Serge Witte (emprunts, stabilisation de la monnaie, construction ferroviaire, essor industriel) puis Piotr Stolypine (réforme agraire, instauration de la Douma, tentatives de levée des interdits pesant sur les juifs), le pays connaît un essor sans précédent, le portant au rang de quatrième puissance économique mondiale.

Après la révolution de février 1917, le cycle continue (communisme de guerre puis nouvelle politique économique, Staline puis déstalinisation, etc.) jusqu'à la libéralisation des années Eltsine et les contre-réformes de Poutine, dont l'échec ukrainien pourrait annoncer la chute (comme le désastre de Crimée avait signifié la fin de Nicolas Ier).

C'est comme si on avait jeté un sort à la démocratie russe. Dès qu'elle balbutie, on la bâillonne. Mais alors, pourquoi? Il faudrait demander comme Étienne de La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire«Quelle malchance a pu tant dénaturer l'homme –seul vraiment né pour vivre librement– au point de lui faire perdre la souvenance de son premier état, et le désir de le reprendre?» La réponse, on la trouve en lisant Dostoïevski.

L'édifiant parcours de Dostoïevski

Sa popularité en France doit beaucoup aux existentialistes, qui saluent sa profondeur métaphysique, aux symbolistes, ou à Camus, qui l'admirait pour ce qu'il lui «révélait de la nature humaine». Or, l'image en France du grand écrivain russe, progressiste dans sa jeunesse, prophète apocalyptique d'une société métastasée par le nihilisme, ou penseur d'un monde en désarroi, est une réalité fantasmée.

En Russie, il est perçu différemment. On trouve son style pesant, sa galerie de personnages une déclinaison sans fin du même type de névrosés. Lénine le détestait, le libéral Anatoli Tchoubaïs lui vouait une «haine physique»; en revanche, Vladimir Poutine, grand fan du romancier comme le rappelle Michel Eltchaninoff, cherche à le mettre à toutes les sauces.

Le parcours personnel de Dostoïevski est un miroir, un raccourci fascinant des ressorts profonds de la société russe, l'aspiration à la liberté qui finit par être étouffée par une sorte d'entropie historique. D'abord, jeune écrivain proche des idées socialistes, favori des clubs mondains à la suite du succès des Pauvres gens, il est arrêté pour son association avec le cercle de Petrachevski, un fonctionnaire aux idées révolutionnaires.

Après une brève incarcération au cours laquelle il croit sa dernière heure arrivée lors d'un simulacre d'exécution, sa peine est commuée à quatre ans de bagne, suivis de quatre ans de bannissement en Sibérie comme simple soldat. De ce séjour au bagne d'Omsk, il tirera un formidable récit autobiographique, Souvenirs de la maison des morts. En le lisant, on comprend pourquoi un soulèvement populaire contre Vladimir Poutine n'est pas possible et pourquoi Alexeï Navalny n'est pas près d'arriver au pouvoir.

Un «syndrome de Stockholm» littéraire

Le livre est un monument de la littérature concentrationnaire, un témoignage extraordinaire de réalisme, de simplicité, écrit sans les lourdeurs de style coutumières du grand romancier. Mais là où ç'aurait pu être une charge à la Napoléon le Petit, un réquisitoire contre la privation de liberté, un pamphlet contre un régime qui n'hésite pas à envoyer les opposants en colonie pénitentiaire pour un oui ou pour un non, Souvenirs, constat désabusé sur la nature humaine, est avant tout un ouvrage de contrition.

Si certains passages, celui du théâtre, particulièrement émouvant (les prisonniers montrent leur humanité lors de la représentation d'une pièce), ou celui où l'on voit Dostoïevski se prendre d'affection pour le chien Boulot, d'autres sont d'une rare cruauté, justement parce que l'écrivain s'abstient de crier sa révolte contre un système aussi ignoble.

Ce qui frappe, dans ce récit, outre la précision extrême, le détachement émotionnel, c'est le consentement face à une situation inique. Les victimes, les détenus, sont devenus les bourreaux, et le bourreau, le tsar (que Dostoïevski le bagnard «adore») et toute la machine bureaucratique qui le sert, devient l'instrument d'un système juste qui sert de mécanisme régulateur de la nature humaine. Comme les otages de Stockholm, Dostoïevski est tombé sous la dépendance émotionnelle de son tortionnaire, le tsar Nicolas Ier, responsable de sa condamnation à mort mais suffisamment magnanime pour commuer sa peine en quatre ans de bagne et quatre d'exil.

L'auteur du Double, préfigurant l'œuvre de Kafka, mariant le fantastique, la folie, l'absurde de la société bureaucratique (d'ailleurs le roman préféré de ceux qui, tel Vladimir Nabokov, n'aiment pas Dostoïevski), ne s'en remettra pas. Il devient l'écrivain des récits interminables, d'une complexité invraisemblable, mais aussi, épousant les valeurs du bourreau, il se transforme en chantre d'une idéologie nationaliste, mystique, conservatrice, xénophobe, qui n'est pas sans rappeler celle des tsars russes, tel le dernier d'entre eux, Vladimir Poutine.

Comme le président de la fédération, l'écrivain est convaincu de la perversion de l'Europe et de l'Occident, matérialiste, décadent, et de la nécessité de préserver la nature «originale» de la civilisation russe, afin qu'elle apporte une «lumière nouvelle» au monde.

Le comte de Custine, dans son récit écrit dix ans avant l'arrestation de Dostoïevski, poursuit: «L'obéissance politique est devenue pour les Russes un culte, une religion. Ce n'est que chez ce peuple, du moins je le crois, qu'on a vu les martyrs en adoration devant les bourreaux!» Plus loin, le diplomate français remarque aussi l'étonnante aptitude des Russes à duper les étrangers. Après tout, Dostoïevski, révéré par les existentialistes, les symbolistes, Camus, Mauriac et l'intelligentsia française, n'aurait-il pas su lui aussi nous berner?

 

[Source : www.slate.fr]

 

quinta-feira, 6 de abril de 2023

Al Cafè amb George Steiner: ‘Presències reals’

 

Traducció d’Helena Lamuela

Escrit per Antoni Martí Monterde

Un clàssic: Real Presences, publicat l’any 1989: aquest llibre de George Steiner va convertir-se immediatament en un clàssic, i va confirmar el seu autor en un dels noms que perdurarà en la història de la crítica literària. No era un llibre de consagració, perquè ja l’havia assolit amb molts d’altres llibres anteriors. Però pel seu posicionament en defensa de l’apreciació estètica de la literatura, per la seva defensa de les humanitats i la funció de la lectura en la vida, aquest llibre significava gairebé un manifest que qualsevol persona amb certes lectures i passions intactes podria signar. Ara es publica en traducció catalana d’Helena Lamuela a editorial Fragmenta, creada fa alguns anys per Ignasi Moreta amb una idea clara i precisa de l’humanisme.

Fragmenta (2022)

Semblava etern, però el 3 de febrer de 2020 va morir Georg Steiner, un comparatista absolut. Tenia 90 anys i lectures mil·lenàries. Havia nascut als afores de París, l’any 1929, en una família benestant jueva exiliada de la Viena que ja presagiava el nazisme; va formar-se, doncs, primer a París, i a partir de 1940 als Estats Units d’Amèrica. Podria dir-se’n que tenia tres llengües maternes: l’alemany, el francès i l’anglès; havia estudiat a París, Chicago, Harvard i Oxford. També havia estat professor a les millors Universitats del món i, en la seva darrera etapa acadèmica, a la de Ginebra.

En això repetia, de manera tàcita, la història d’altres grans comparatistes europeus com són Leo Spitzer, Erich Auerbach o René Wellek, aquest darrer en una doble fugida, primer del nazisme i després de l’stalinisme. Va ser una generació irrepetible que, sense ser fundacional en la història de la literatura comparada, van constituir un estol extraterritorial que va redefinir al llarg del segle XX els estudis literaris com a represa de l’ideal de la Weltliteratur.

afirma que la mirada del crític comparatista comença precisament en les derrotes de la traducció; tot allò que no és traduïble entre literatures i necessita una relació crítica, és la veritable ocupació del comparatista

Steiner s’hi va sumar amb una profunda meditació sobre les llengües literàries i la tradició cultural. No per casualitat un dels seus primers llibres es titulava Extraterritorial (1972) i comença amb una reflexió sobre el canvi de llengua en els escriptors; i el conjunt de la seva obra pot considerar-se una immensa reflexió sobre el llenguatge i la humanitat entesos de manera indissociable: «tota la filosofia, tota la metafísica és una acció del llenguatge»; van seguir molts d’altres: Llenguatge i silenci  (1967) En el Castell de Barbablava (1971), Després de Babel (1975). En molts d’aquests llibres la reflexió sobre la traducció literària ocupa un espai determinant; però en una conferència pronunciada a Oxford l’any 1994, «Què és literatura comparada», més tard recollida en Passió intacta (1996) afirma que la mirada del crític comparatista comença precisament en les derrotes de la traducció; tot allò que no és traduïble entre literatures i necessita una relació crítica, és la veritable ocupació del comparatista. Amb la qual cosa també recorda, com en Després de Babel, que «la literatura comparada llegeix i escolta després de Babel; pressuposa la intuïció, la hipòtesi que, lluny de ser un desastre, la multiplicitat de les llengües humanes (…) ha estat la condició indispensable perquè homes i dones gaudeixin de la llibertat de percebre, d’articular i de “escriure” el món existencial en plena llibertat».

Per a Steiner, que no és precisament sospitós d’enarborar cap nacionalisme, «cap llengua somia de la mateixa manera que una altra. L’extinció d’una llengua, per remota o immune que hagi estat a l’èxit històric i material, o a la difusió, és la mort d’una visió del món de caràcter únic, d’un gènere de la memòria, d’una forma de viure el present i el futur». És evident que aquesta argumentació d’Steiner té un sentit diferent si és llegida a Londres, Nova York, o Girona. Precisament a Girona va ser investit Honoris Causa per la Universitat l’any 2001, i en visitar la ciutat va emocionar-se en passejar pels carrers del Call, tot recordant els seus orígens jueus tal com relata en un dels seus millors llibres Errata, les seves memòries.

Precisament a Girona va ser investit Honoris Causa per la Universitat l’any 2001, i en visitar la ciutat va emocionar-se en passejar pels carrers del Call, tot recordant els seus orígens jueus tal com relata en un dels seus millors llibres Errata, les seves memòries

Només hi podem afegir un dubte –no una recança: en posar en el centre de la seva lectura de la ciutat la identitat jueva, no fa la mateixa operació sobre la pròpia diferència que criticava als New Cultural Studies? I encara una altra pregunta no inquisitiva: en projectar sobre Europa, tant ell com Bloom, els mateixos problemes d'una mala lectura que s’havia fet en algunes universitats dels Estats Units de les teories de Derrida sobre la diferència, no estava esborrant la diferència europea, la intel·ligència europea que encara no havia estat esborrada pel poder omnívor de l’acadèmia angloamericana? Tant fa: Steiner sempre seran un dels nostres, una part importantíssima de la nostra tradició.

Des del seu primer llibre Tolstoi o Dostoievski (1960), deixa clar que aquesta reflexió se sustenta sobre els grans clàssics de la literatura universal. En llegir les seves pàgines de vegades sobtava —i a alguns irritava— que gairebé mai no posés notes al peu de pàgina. No era cap gest d’arrogància, senzillament la incorporació de les seves immenses lectures a la seva escriptura feia que als seus assaigs les marques rudimentàries de l’erudició es dissolguessin en el pensament. Dit d’una altra manera: la saviesa no necessita notes al peu. Les seves lectures dels clàssics, des d’Homer als grans novel·listes russos, passant per Shakespeare i Nabokov implica sempre una aproximació estètica al fet literari. En aquest sentit Presències reals (1989), com El cànon occidental (1994) de Harold Bloom van ser llegits o, més aviat discutits, com una resposta conservadora i irritada al predomini dels New Cultural Studies i la Desconstrucció en les aules universitàries dels Estats Units. La translació una mica acrítica d’aquella polèmica a Europa va crear un munt de malentesos sobre la figura de tots dos crítics, que han de passar a la història com dos dels lectors més intel·ligents de la recent època de la lectura universal.

No feia gaire, la tardor de 2019 també havia traspassar Harold Bloom. Abans, el 2003, havia desaparegut —i perdó per la redundància— l’invisible Maurice Blanchot; Jacques Derrida va morir poc més tard, el 2004, de la defunció de Hans Georg Gadamer en 2003, qui precisament va ser trobat sense vida amb un llibre del desconstruccionista a la tauleta de nit.

Ens estem quedant sols, cada dia més sols, des de fa alguns anys plana entre l’Humanisme Occidental la sensació d’una fi d’època. És una sensació que segurament tenien també els contemporanis d’Erich Auerbach, Léo Spitzer, Ernst Robert Curtius, i René Wellek; segurament també qui va conèixer en temps real la mort accidental de Roland Barthes, o la defunció epidèmica de Michel Foucault, podrien dir coses semblants.

Amb George Steiner va desaparèixer segurament un dels últims grans humanistes europeus; el seu relleu no està del tot garantit, però en aquest moment figures com ara Claudio Magris o Hans Ulrich Gumbrecht tenen perfils molt semblants.

La idea d’Europa va ser el primer llibre seu editat en català, en traducció de Víctor Compta, a l’editorial Arcàdia, un llibre que sembla escrit a la llum de la finestra d’un Cafè. Presències reals sembla escrit a la llum d’una biblioteca profunda i insondable

Va ser algú que va llegir i estimar Europa i la va salvar de la seva dissolució tot recordant de manera constant uns orígens que Europa va estar a punt de destruir, o, més aviat, d’autodestruir; en un brevíssim però imponent llibre, La idea d’Europa, subratlla que mentre hi hagi Cafès, la idea d’Europa tindrà contingut. Per a Steiner en dibuixar un mapa de Cafès apareixia el rostre d’Europa. La seva relectura és trobar forces per a continuar fent literatura comparada. La idea d’Europa va ser el primer llibre seu editat en català, en traducció de Víctor Compta, a l’editorial Arcàdia, un llibre que sembla escrit a la llum de la finestra d’un Cafè. Presències reals sembla escrit a la llum d’una biblioteca profunda i insondable, però clara i precisa en les pàgines del llibre.

El tercer capítol de Presències reals comença amb una reflexió sobre l’existència del llenguatge i de l’art, precisament perquè existeix «l’altre»; nosaltres som l’altre dels altres, i som un altre per a nosaltres mateixos; podem rellegir-lo ara en llengua, en la llengua d’un altre com qualsevol altre, la nostra, precisament perquè, malgrat tot, no ha desaparegut. Potser aquesta és una de les més belles maneres de recordar la personalitat de George Steiner: salvar, amb els seus pensaments en la nostra llengua, una visió d’Europa i del món.

 

[Font: www.laveudelsllibres.cat]

sábado, 17 de dezembro de 2022

‘The Paris Review’, el arte de la conversación literaria

Algunas portadas de The Paris Review

Escrito por Matías Bauso

Un grupo de jóvenes americanos escritores en París. Iban tras la estela de F. Scott Fitzgerald, de Hemingway, de los que entre guerras escribían en los bares de la ciudad; iban detrás de una mística que parecía perdida. Peter MatthiessenWilliam Styron y Harold Humes se propusieron editar una revista literaria. Una más de las muchas que aparecían, y desaparecían. A último momento llegó desde Inglaterra, donde estaba estudiando, George Plimpton. Él trabajaría en el día a día y saldría a buscar el dinero para que la publicación pudiera solventarse. Cuando apareció en la primavera de 1953, nadie creyó que setenta años después todavía seguiría saliendo. The Paris Review subvirtió el dictum de Fabián Casas: «Las parejas y las revistas literarias casi siempre duran dos números».

*

Para el primer número tenían una buena selección de poemas y cuentos de autores inéditos, casi desconocidos. Necesitaban algún gran nombre que llamara la atención. Pero no podían pagar por él. Y deseaban ir contra la moda del momento. Estaban cansados de los críticos, del imperio de la crítica. En París, bajo el dominio de Sartre y con el estructuralismo a punto de irrumpir, los fundadores de la revista deseaban poner el centro en los escritores. Para eso se les ocurrió conversar con ellos e indagar sobre el oficio.

Esa fue la idea que los inmortalizó.

*

La entrevista es un género artificial, desequilibrado, incluso algo injusto. No suele ser un diálogo entre pares: no hay equivalencia ni reciprocidad. Una conversación asimétrica donde el que hace el mayor esfuerzo, el que más resalta, el que justifica la pieza periodística, es el que no cobra. Pierde tiempo, pone lo mejor de su intelecto, para no tener la última palabra, para quedar en manos de su interlocutor, quien muchas veces busca hacerlo caer en la trampa de una confesión inesperada o del one-liner contundente, aunque no necesariamente representativo, que llame la atención y funcione como título.

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Los que entrevistan en The Paris Review son conscientes del artificio del género. No buscan grandes revelaciones, ni confesiones intempestivas. Llegan al encuentro convencidos de que no se debe traicionar al entrevistado. Saben que deben pasar desapercibidos, ser propiciadores: médiums tímidos. Se despojan de su personalidad y se convierten en lo que todo buen entrevistador debe ser: en el hombre (o la mujer) invisible.

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Las entrevistas ya se acercan a las trescientas. Casi setenta años de conversaciones, de confesiones de escritores. Sin embargo, todo puede condensarse en tres de las iniciales. En ellas, tal vez, resida el secreto de su vigencia y, claro, de su longevidad. Son las que determinaron el formato, las que le imprimieron el carácter definitivo.

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Para iniciar la sección alguien propuso a Irwin Shaw. Tenía éxito, era respetado por su oposición al macartismo, poseía un indudable oficio y, tal vez el dato decisivo, vivía en París: no tenían presupuesto para viajar. También era, para muchos, el próximo Hemingway, un hombre de acción con una prosa musculosa.

Pero George Plimpton quería que el primer entrevistado fuera E. M. Forster. Parecía un objetivo inalcanzable para el grupo de jóvenes escritores norteamericanos, algo ignotos, que lanzaban una revista literaria (más). El secretario de redacción hizo valer sus habilidades sociales. Había conocido al novelista mientras estudiaba en Inglaterra. Recurrió a dos amigos, especialistas en literatura inglesa, que había hecho en Harvard. Francis Haskell y P. N. Furbank entrevistaron a E. M. Forster.

Hoy es evidente que no hubiera sido lo mismo un encuentro con Irwin Shaw; tal vez con otro comienzo esta tradición extraordinaria nunca se hubiera instalado. De todas maneras, Shaw fue el cuarto escritor que apareció en la serie.

En una carta a sus padres, al contarles el sumario del primer número, Plimpton describe el encuentro con el novelista inglés como «un ensayo sobre la técnica de la novela en forma de diálogo con E. M. Forster». Luego, el genio del editor y el título de la sección: «Writers at Work: The Art of Fiction».

*

La siguiente entrevista canónica fue la de Ernest Hemingway. De ella se encargó George Plimpton. No cualquiera podía enfrentarse a «Big Papa». O no cualquiera podía convencerlo. Todo empezó una tarde que Plimpton entró al bar del Ritz. Por primera y casi única vez en su vida, vio a alguien leer la revista. Ese lector con el primer número entre sus manos tenía una espesa barba blanca. George, algo alcoholizado, pensó que se trataba de una ilusión óptica. Pero no. Era Ernest Hemingway. Le habló de la entrevista y, sin nada demasiado firme, con la fragilidad de las promesas en las conversaciones de borrachos, promesas que se prodigan, pero nunca se cumplen, quedaron en encontrarse en Madrid. Plimpton, pertinaz, fue tras su presa (Hemingway era Hemingway, un peso pesado, pero no el héroe de George: ese era Francis Scott Fitzgerald). Cuando dio con él en España las cosas no resultaron como había pensado: «Vine hasta acá para entrevistarlo. Pero Hemingway, desgraciadamente, no está bien. No creo que esté con ganas para una entrevista», les escribió a sus padres. Un par de semanas después, otra carta: «Grandes momentos en Madrid. No hice demasiado de la entrevista porque Hemingway no quiere hablar sobre la escritura, y no lo quiero presionar. Y la verdad es que uno no quiere hablar demasiado sobre escribir con un hombre que te cuenta sobre elefantes, sobre cómo cazarlos, sobre la pesca de tiburones y que tiene mucho para decir sobre los Mau Mau y sobre África. España es un gran país y yo tengo el mejor guía posible».

Al final Plimpton lo fue llevando por los caminos que deseaba, por aquellos que había soñado cuando pensó la sección. El resultado fue colosal. Una clase de escritura en la que Hemingway cuenta su teoría del iceberg, que escribe parado delante de un atril, habla de la influencia de los pintores en su obra y prefiere no demostrar ni un gramo de grandeza o generosidad halagando a sus contemporáneos; solo tiene elogios para antecesores o para maestros de otra disciplina: Hemingway no reconocía pares entre los vivos.

*

El otro norteamericano que casi no daba entrevistas era William Faulkner. Su conversación con Jean Stein fija muchas de las creencias y convicciones de Faulkner sobre el oficio. De allí surge lo del prostíbulo como lugar ideal para el escritor y lo del trabajo sobre la inspiración. Nadie creyó que podían conseguir al autor de Mientras agonizo. Jean Stein era una joven escritora, bonita y decidida, que en una reunión con una camisa escotada y sin corpiño, consiguió que Faulkner aceptara. Luego de la conversación mantuvieron una relación clandestina, a pesar de los treinta y cinco años que los separaban. Después de entregar su trabajo, Jean Stein se convirtió en secretaria de redacción de la revista (se recomienda con fervor buscar sus historias orales; la que escribió junto a Plimpton sobre Edie Sedgwick, la musa de Warhol y Al oeste del Edén, sobre cinco importantes familias de Los Ángeles).

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En esta historia hay un personaje clave: George Plimpton, el director eterno de la publicación desde su primer número hasta su muerte en 2003. Era un hombre encantador y culto, cronista eficaz que terminó descollando en los textos deportivos. Fue el fundador, o al menos el principal difusor, de la historia oral como género. Amante voraz, famoso y deseado entre la socialité de París y Nueva York, el catálogo de sus amantes parece el índice de una revista norteamericana de esas décadas: actrices, escritoras célebres, alguna modelo, mecenas, otras damas de la aristocracia y una mujer fuera de cualquier categoría, fuera de escala: Jackie Kennedy (o Bouveir u Onassis). Se destacó en el participatory journalism, una especie de periodismo que hizo muy conocido Paul Gallico, antes de dedicarse a producir best sellers como La aventura del Poseidón. Peleó contra el campeón del mundo Archie Moore, jugó fútbol americano con los Detroit Lions, lanzó en un equipo de la MLB, todo para poder contarlo. Hizo cameos en Lawrence de Arabia y en Los Simpson. Plimpton es, también, el canoso flaco como un junco, que se para emocionado y algo incrédulo en la segunda fila del ring side en When We Were Kings cuando Alí comienza a demoler ese edificio llamado George Foreman.

Obstinado y encantador, logró que la revista no pereciera. Consiguió financiamiento durante décadas. Él sedujo a su excompañero de Harvard, el hijo del Aga Khan, una de las mayores fortunas del momento, para que fuera el socio capitalista —a pérdida— de The Paris Review.

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Para comprender la capacidad lectora de Plimpton basta un ejemplo. Cuando la revista buscaba asentarse, lanzó un concurso. Ellos publicaban cuentistas y poetas desconocidos. Ahora lo querían hacer con el aval de un jurado de prestigio que presidía Saul Bellow. Pero al recibir los resultados, Plimpton se desilusionó. Respetó el dictamen y se quejó amargamente con sus amigos: «El jurado ya tiene un veredicto. El problema es que eligió a los equivocados. Había otros cuatro trabajos notables». La revista pagó el premio a los ganadores y los publicó. Pero también llevó a sus páginas a los otros que había preferido su director: Jack Kerouac y un capítulo de En el camino, textos de Nadine Gordimer y Evan S. Connell y un cuento de Richard Yates.

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Volvamos al encuentro con Hemingway y a un secreto que hace funcionar al formato. Hemingway corrigió de manera exhaustiva la versión que salió publicada. Sacó, modificó, agregó; reescribió el texto hasta quedar satisfecho, hasta que dijera mucho mejor lo que él había respondido. Ese no fue un beneficio que obtuvo Hemingway en virtud de su carisma. Es un modo de proceder de la revista para obtener piezas que reflejan al escritor y que no se erosionen con el paso del paso del tiempo. Fueron muchos los que reescribieron sus intervenciones. John Updike retocó sus respuestas para eliminar todo resabio de lo oral. Saul Bellow conversó con su entrevistador dos tardes consecutivas durante horas, pero el trabajo de ambos sobre la transcripción duró un mes y medio. Más conocido es el caso de Nabokov, que recibió las preguntas de antemano y contestó con sus prolijas fichas (hasta imaginó repreguntas para remedar una dinámica oral inexistente). El caso más extremo puede ser el de Kurt Vonnegut: su entrevista es el compendio de cuatro encuentros a lo largo de una década y finalmente retocada por el autor de Matadero cinco; el entrevistador en el párrafo introductorio reconoce que podría considerarse una entrevista que se ha hecho él mismo.

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Las reescrituras no impiden que las piezas tengan profundidad y vida. Plimpton, por ejemplo, con habilidad y extrema elegancia, no evita quedar como torpe para que se luzca su entrevistado. «Me estoy alejando de su pregunta, pero la verdad es que lo que me preguntó es muy poco interesante», dice Hemingway. En otro fragmento habla de preguntas rancias. Y Plimpton prefirió conservar esa irritación hemingwayniana; una buena manera de mostrar lo inteligente que es su interlocutor comparándolo con el papanatas del entrevistador, aunque sea él mismo. Show, don’t tell.

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¿Escribe a mano o a máquina? ¿En qué lugar lo hace? ¿Cuáles son sus horarios? ¿Tiene algún rito? ¿Cuál es su método de corrección? ¿Y las influencias? ¿Cómo trabaja los personajes? ¿Cómo inicia un texto? ¿Cuál es el disparador de un libro? ¿Aparece primero la trama? ¿Lee mientras escribe? ¿Corrige mucho? ¿Qué opina de la crítica?

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En la conversación con Tom Wolfe, la cuestión se explicita: «Esta no sería una entrevista de The Paris Review si no preguntáramos sobre sus hábitos». Philip Roth asegura que no necesita saber nada sobre lo que hacen los otros escritores, que no le interesan los hábitos de trabajo ajenos. Joyce Carol Oates no está de acuerdo. Para ella los escritores quieren saber los horarios de trabajo de los demás, cuánto tiempo se la pasan sentados en el escritorio. Los mueve una sola finalidad: saber si los demás están tan locos como ellos.

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Estas charlas sirven para darse cuenta de que la escritura es un oficio, como cualquier otro, que se debe desacralizar. Ahí están las herramientas e incluso las supersticiones que los ordenan, que les dan seguridad, que los empujan a escribir, que los cobijan de la soledad y del abismo del bloqueo.

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El formato tiene algo de invencible. Los ejemplos son múltiples. Y no hablamos solo de escritores y de The Paris Review. Es casi hipnótico escuchar (o leer) a alguien apasionado sobre su oficio, ya sea alguien que sopla vidrio, un carpintero, un deportista de élite o un artista, mostrando sus secretos, sus hábitos, manías, tics. El mismo principio de inmersión en el proceso creativo, en la jornada cotidiana de un artista, es lo que vuelve fascinantes las conversaciones de Inside The Actor’s Studio o de El sol del membrillo, de Víctor Erice.

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Tardaron bastante en aparecer mujeres en la sección. Cuando lo hicieron se produjo una racha extraordinaria, un trío consecutivo maravilloso del número trece al quince: Dorothy ParkerIsak Dinesen y Françoise Sagan.

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No solo salieron a buscar escritores de ficción. En sus archivos hay (muchos) poetas: de T. S. Eliot —el primero con el que hablaron— a Robert Lowell, de Seamus Heaney a Anne Carson. También hay dramaturgos (Tom Stoppard), críticos (Susan Sontag), periodistas (John Hersey), autores de cómics (Robert CrumbChris Ware), editores (Robert Gottlieb), historiadores (el colosal Robert Caro, que lleva adelante una de las tareas más minuciosas encaradas en el último medio siglo: su biografía de Lyndon B. Johnson, de la que está terminando el quinto monstruoso volumen) e incluso cineastas (Billy WilderMichael Haneke).

En todos funciona el mismo truco. Gente que ama lo que hace y que por eso es tan cuidadosa cuando habla de sus oficios inexorables, de los que jamás podrían fugarse.

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Para descubrir la cantidad de autores que pasaron por las páginas de la revista, tal vez resulte más sencillo enumerar los que no estuvieron. Esa lista es mucho más reducida.

Si los Óscar, los Nobel o el Pléiade tienen sus omisiones, también las tiene la revista. Pero estas son menos escandalosas y notorias que en los otros casos. Nos podemos lamentar de la ausencia de Wisława Szymborska, de Clarice Lispector, de A. J. Liebling, de Ryszard Kapuściński o de Kenneth Tynan, por ejemplo, pero esos pueden ser más caprichos de lector que objeciones a una lista casi canónica.

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Con el título de la sección, «Writers at Work», se editó el primer compilado en el mercado anglosajón antes de que terminara la década de 1950. Luego se convirtió en colección. En castellano también son varias las antologías. Las primeras ya tienen cuarenta años: Los escritores hablan. Décadas después, en Argentina se editaron varios tomos temáticos; cada uno traía un prólogo de un escritor local. También El Aleph compiló varias prologadas por Ignacio Echevarría. Un par de años atrás, Acantilado sacó una edición impactante. Una caja, dos tomos de contundentes tapas duras, papel biblia, casi tres mil páginas, cien entrevistas, pero ningún prólogo.

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Cada pieza puede leerse de manera autónoma, pero también funcionan como corpus armónico. Hay conexiones secretas entre las diferentes entrevistas, diálogos velados entre escritores de distintas épocas y nacionalidades. Se reafirman, se contradicen, se complementan.

Las entrevistas de The Paris Review constituyen, al mismo tiempo, retratos de artistas, autorretratos, manuales de instrucciones y una estética de casi todos los grandes escritores de los últimos setenta años. Conforman una obra monumental sobre el oficio literario moderno.

 

[Fuente: www.jotdown.es]