Le portunhol, nouvel idiome, mélange d’espagnol et de portugais mâtiné de guarani ou d’anglais, met son poil à gratter canaille dans les parlers d’Amérique du Sud. Ça réveille !
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Le poète Douglas Diegues |
Il y a longtemps que les habitants de la triple frontière entre le Brésil, l’Argentine et le Paraguay se débrouillent pour communiquer. On improvise un mélange de portugais et d’espagnol et on se comprend ! Ce sabir, baptisé "portunhol" (ou "portuñol", les deux orthographes sont possibles) évolue sous chaque tropique.
La nouveauté c’est que depuis quelques années, cette langue alimente une production littéraire novatrice et féconde. Elle tient même ses propres salons qui prennent de plus en plus d’importance, comme le FLIPorto de Porto de Galinhas (Pernambouc) ou le récent Flap, Festival de littérature alternative de São Paulo. Tous deux font ouvertement référence au festival de littérature étrangère de Paraty (Rio de Janeiro), le Flip, une institution hautement élitiste. Pour sa 3e édition en 2008, la langue officielle du Flap y était… le portunhol sauvage !
Une langue parfaitement compréhensible et magnifiquement créative
Il est à noter que l’idiome est qualifié de sauvage en référence aux forêts primitives du continent. Il mélange certes le portugais et l’espagnol mais aussi le guarani ou une touche d’anglais. Toute langue ou dialecte qui pourra lui apporter sa saveur est le bienvenu.
Le Brésilien Wilson Bueno passe le portunhol à l’écrit pour la première fois en 1990 avec Mar paraguayo. Puis le poète Douglas Diegues donne de l’ampleur au mouvement avec son premier livre, paru en 2002, Da gusto andar desnudo por estas selvas ("Il est agréable de se promener nu dans ces jungles"). Son style ne s’impose aucune règle. Il revendique au contraire un côté "free-style" très intuitif. Il n’en est pas moins parfaitement compréhensible et magnifiquement créatif. L’auteur a lancé sa maison d’édition, Yiyi Jambo, pour publier les œuvres d’auteurs brésiliens, argentins, paraguayens, boliviens, chiliens ou vénézuéliens.
Un comité vient d’être créé pour traduire les œuvres complètes de Manuel de Barros en portunhol sauvage, espagnol et guarani. Pour le poète, Joca Terron, le portunhol sauvage est déjà le parler "des courriels et des bistrots de Sampalândia (São Paulo)". Pour le Chilien Hector Hernandez Montecinos, c’est la langue officielle de toute l’Amérique latine d’ici 10 ans… A vos dictionnaires !
Constance LOPEZ
[Photo : impostor.wordpress.com - source : www.lepetitjournal.com]
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