En 1940, les Juifs représentent une infime fraction de la population française. Ils sont en revanche très nombreux dans tous les mouvements de résistance. Le documentaire Ils étaient juifs et résistants d’Alain Jomy a pour ambition d'évoquer leur mémoire. Il sera projeté le mercredi 9 novembre 2016 à 20h au CCLJ, en présence du réalisateur.
Écrit par Stéphane Meyer
Une communauté plurielle, dispersée et surtout citoyenne de la République ne peut par essence entreprendre d’action armée singulière, a fortiori lorsque le génocide n’est pas une guerre conventionnelle, mais une véritable traque. C’est la raison pour laquelle, en France, la Résistance prend d’abord des formes sociales et humanitaires. Il s’agit de parer aux besoins de la communauté juive dont on pressent déjà la détresse à venir. Des cantines populaires, des dispensaires, des comités d’immeubles et des organisations scolaires clandestines sont créées.
Ensuite, la résistance juive est rapidement complétée par une série d’actions clandestines : faux papiers, aide illégale aux Juifs, évasions et sauvetages des enfants. A partir de l’été 1942, des organismes juifs se spécialisent dans le sauvetage d’adultes et d’enfants juifs. Du Comité de la Rue Amelot (Paris) à l’OSE (Œuvre de secours aux enfants), le sauvetage des enfants prend une place significative dans la Résistance juive. « Quand le génocide est une chasse exterminatrice, c’est là le sens principal du mot résistance », souligne Georges Bensoussan, historien français spécialiste de la Shoah. Ainsi, l’OSE cache plus de 2.000 enfants juifs dans ses homes et organise l’exfiltration de près de 1.000 autres vers la Suisse. Près de 10.000 enfants juifs sont mis à l’abri par d’autres organismes juifs.
Le passage de la résistance humanitaire à celle plus ciblée contre l’occupant allemand se fait naturellement. Dans cette forme de résistance, la presse juive clandestine, tant en français qu’en yiddish, joue un rôle déterminant. Elle devient même une voix unique au sein de la presse clandestine française, car elle est riche d’informations sur les persécutions et les déportations des Juifs de France.
Comme tous les résistants, les Juifs viennent d'horizons divers, et leur entrée dans la résistance est liée à une formation politique ou à un idéal. Cette résistance a été multiple, variée, à l'image de ceux qui la composent. C’est ainsi que les Juifs seront surreprésentés au sein de la France libre à Londres. S’ils rallient le général de Gaulle, ce n’est pas en tant que juifs, mais avant tout par patriotisme. « Toutefois, cet engagement résistant revêt une signification collective, parce qu’ils sont nombreux et que cet engagement est précoce », nuance Renée Poznanski, historienne israélienne spécialiste de la résistance juive en France.
Lutte armée
Il existe néanmoins des groupes de résistants juifs qui mènent la lutte armée en tant que tels. Dans le sud-ouest de la France, la modeste armée juive fondée en 1942 à Toulouse devient l’Organisation juive de combat (OJC). Des mouvements juifs de jeunesse, tels que les Éclaireurs israélites (EI) ou l’Hashomer Hatzaïr, se joignent aussi à la résistance armée et au sauvetage des enfants. Et fait peu connu, près de 80% des combattants qui ont concouru au débarquement anglo-américain du 8 novembre 1942 en Algérie sont juifs !
Enfin, lorsqu’on évoque la lutte armée contre les Allemands, on ne peut passer sous silence le courage des combattants juifs des FTP-MOI (Francs-tireurs et partisans - Main-d'œuvre immigrée) liés au Parti communiste français. Actifs dans les régions toulousaine, lyonnaise et marseillaise, c’est surtout à Paris que les FTP-MOI vont entrer dans la légende. En 1943, les actions les plus spectaculaires de la Résistance à Paris sont commises par les FTP-MOI juifs.
Cette participation importante des Juifs à la résistance antinazie met à mal le cliché de la passivité juive face à leur destruction. Pour survivre, les Juifs ont dû lutter, car comme l’explique Adam Rayski, un ancien combattant des FTP-MOI : « Sur les horloges de l’Histoire, les aiguilles avançaient plus vite pour les Juifs que pour les autres peuple de l’Europe occupée ».
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