quinta-feira, 3 de março de 2016

Des taureaux et des hommes

Écrit par France Clarinval 

Du Brésil, on se contente souvent des images de cartes postales - pain de sucre, carnaval, plages de Copacabana – ou d’actualité difficile – forêt amazonienne dévastée, crimes odieux dans les favelas. Dans Neon Bull, Gabriel Moscaro nous fait découvrir un aspect méconnu, le «vaquejada». C’est un rodéo prenant place dans le nord-est du Brésil où deux hommes à cheval doivent mettre à terre un taureau en l’attrapant par la queue.

Pour ce faire, il ne signe pas un documentaire, mais nous fait suivre Iremar qui est chargé de prendre soin des taureaux et de la petite bande avec laquelle il vit dans le camion qui transporte les bestiaux. Il y a son collègue Zé, ventripotent et amateur de femmes, Galega, qui conduit et répare le camion le jour et danse très peu vêtue la nuit accompagnée de sa petite fille Cacá, grande gueule tendre à la recherche de son père. Quant à Iremar, il rêve de devenir styliste. Il récupère des chutes de tissus, dessine des robes (sur les magazines porno de son collègue!) et les coud après sa journée.
Avec un regard tantôt tendre, tantôt ironique, le réalisateur nous plonge dans leur quotidien pas toujours rose, et détaille avec fougue et sensualité les coulisses rudes et secrètes de ce monde pour le moins haut en couleurs. Il nimbe ses images d’une lumière douce et d’un voile lacté qui apportent une distance sur son sujet qui autrement, friserait le documentaire. Car il n’épargne au spectateur aucun détail de la vie des vachers, ni les plus drôles (Iremar et Zé qui masturbent un étalon en espérant vendre sa semence), ni les plus crus (une scène d’amour très explicite), ni les plus anodins (les longs trajets, les doigts manucurés…). Une très belle découverte.

Donner de la voix

Présenté dans la section «Film made in/with Luxembourg», Le Chant des hommes, coproduit par Tarantula et réalisé par Bénédicte Liénard et Mary Jiménez, aura une résonnance particulière avec l’actualité tout en se penchant sur un fait plus ancien : l’occupation d’une église par des migrants sans papiers.



Ils se nomment Moktar, Najat, Joseph, Gernaz, Duraid, Hayder, Kader, Esma… Ils ont fui la Syrie, l’Irak, l’Iran, le Congo, le Maroc, le Niger… Ensemble, ils décident d’occuper une église. Ils vont risquer leur vie pour des papiers. Le décompte des jours commence; l’épreuve de force aussi. À l’intérieur, Kader a pris la tête du combat mais va et vient, secret. Esma organise la vie de cette communauté qu’elle porte à bras-le-corps. La fatigue monte, les tensions affleurent. Mais les liens se tissent et se renforcent. Entre trahisons et fraternités, le groupe va devoir se mettre à l’épreuve. Et faire face.
Les réalisatrices se sont inspirées de nombreux cas de grèves de la faim de sans-papiers, qui défraient régulièrement la chronique. Le tandem avait déjà signé un documentaire radiophonique sur les occupations d’églises, en 2009, notamment celle, célèbre, de l’église du Béguinage, durant laquelle deux cent trente sans-papiers avaient jeûné afin d’obtenir leur régularisation.
Leur film, en grande partie tourné à Luxembourg dont on reconnaîtra sans peine l’église Saint-Michel et ses environs, entend redonner une voix et un visage à ces «sans-papiers» anonymes. Et reste à ce titre tout autant d’actualité que lors de son écriture ou de son tournage.
Neon Bull, ce soir à 18h30 à la Cinémathèque
Le Chant des Hommes, ce soir à 19h au Ciné Utopia
La programmation du jour est à voir ici.

[Source : www.paperjam.lu]

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