quarta-feira, 9 de novembro de 2016

L'histoire de l'amour, de Radu Mihaileanu


Conteur, créateur d’émotions, Radu Mihaileanu, le réalisateur de Train de Vie, Va, vis et deviens et Le Concert, revient avec une fresque historique dense. Malmenés par la vie, ses personnages défient cet âpre matériau avec passion et dignité. Entre le clap du premier jour de tournage, toujours donné par son père, et le free hug qu’il encourage dans les salles de cinéma à la fin de son film, le réalisateur nous parle d’Amour. Interview.

Écrit par Florence Lopes Cardozo 
Qu’est-ce qui vous a plu dans L’Histoire de l’Amour de Nicole Kraus ?
Radu Mihaileanu J’ai lu le livre lors de sa parution en 2006 et j’ai été bouleversé par son écriture sublime, sa déconstruction faite d’allers-retours entre le passé et le présent. En substance, deux personnages traversent le 20e siècle, ramenant un souffle d’amour à travers le temps et les continents, tandis qu’une adolescente new-yorkaise d’aujourd’hui se bat pour trouver et vivre cet amour de façon idéaliste. Comme j’adore les histoires, et particulièrement celles où la grande Histoire dialogue avec la petite, j’ai été touché par ces personnages et leurs destinées. Mais pas une seconde, je n’avais pensé en faire un film. Lorsqu’ il y a trois ans, mes producteurs m’ont rapporté le livre, sachant que je l’avais aimé, j’y ai retrouvé la même émotion. Notre époque avait entre-temps déjà évolué, avec ses tensions et « déluges », et je me suis dit qu’il fallait apporter une part de ce bonheur aux gens. Et reposer cette question cruciale : « Qu’est-ce que l’amour aujourd’hui et en sommes-nous toujours capables ? ».
Quelles libertés avez-vous prises par rapport au roman ?
R.M. Le langage cinématographique demande parfois d’autres moyens narratifs, comme créer des personnages nouveaux, liberté totale que j’ai prise sans trahir l’esprit du livre. Nicole Kraus était d’accord avec cet aménagement. Ayant toujours besoin de m’approprier les récits, je me suis aussi beaucoup inspiré de l’histoire de mon père, 95 ans, et de ce que j’ai un peu vécu. Je me suis d’ailleurs tellement identifié au récit que je ne sais plus, excepté un personnage que j’ai inventé et quelques dialogues, ce qui figurait dans le livre et ce que j’ai apporté !
Comment la mécanique du duo Léo/Bruno s’est-elle mise en place et comment avez-vous réussi à mettre ce savoureux yiddish dans la bouche de Dereck Jacobi ?
R.M. Comme dans le livre, ces deux vieux sont des gamins qui se chamaillent sans cesse. Dereck Jacobi (Léo) et Eliott Gould (Bruno) empruntent le rythme de ces échanges à Woody Allen qu’on a beaucoup regardé, à Lubitsch et même aux dessins animés. C’est aussi une cadence qui vient de la paranoïa juive et du théâtre yiddish que j’ai pratiqué dans ma jeunesse. Ensuite, il fallait exagérer un peu le jeu de Bruno pour les besoins du récit. Et effectivement, quatre acteurs, dont Dereck Jacobi, ont enduré deux mois de coaching pour parler l’anglais avec l’accent yiddish polonais !
Concernant l’amour, voyez-vous les relations humaines comme immuables ou fondamentalement différentes entre 1940 et 2006 ?
R.M. Je pense que le désir et le concept d’amour demeurent pareils depuis la nuit des temps. Après, bien sûr, il est vécu différemment à chaque époque. L’amour de Léo et Alma, indéfectible des années 30 aux années 2000, n’a rien à voir, malgré ses contrariétés et problématiques, avec la difficulté et l’amour des adolescents d’aujourd’hui. Pour eux, c’est beaucoup plus compliqué et dur, notamment du fait de la virtualité. Dans le film, la jeune adolescente est piquée d’un amour des années 30 qu’elle ne comprend pas. Elle peine à l’adapter à notre époque et à se faire comprendre de son entourage. Donc je montre la différence fondamentale entre l’amour des deux époques. Il n’est pas décrit de la même manière, sans parler des séparations et divorces faciles qui, alors, n’existaient pratiquement pas.
L’écrit est aussi au cœur du film. Qu’est-ce que le livre représente pour vous ?
R.M. Un des thèmes forts de l’histoire est ce « virus merveilleux » de l’amour qui se transmet par la force de l’écriture. Il m’est indispensable de dire que ce livre-là, cette longue déclaration d’amour écrite par Léo pour Alma, est devenu un puissant vecteur d’amour. Et tous ceux que ce livre a touchés ont été piqués d’amour et l’ont développé autour d’eux. C’est presque une métaphore et il est important de le rappeler de nos jours : la culture, l’écrit peuvent sauver l’être humain dans des moments difficiles, l’aider à se relever suite à des tragédies incommensurables.
En bref

En Pologne, dans les années 30, Léo avait promis à Alma de la faire rire toute sa vie. La guerre les a séparés. Alma a fui à New York et Léo a survécu à tout pour la retrouver et tenir sa promesse. De nos jours, à Brooklyn, vit une adolescente pleine de passion et d’imagination, elle s’appelle aussi Alma. Léo est devenu un vieux monsieur espiègle. Il vit avec le souvenir de « la femme la plus aimée au monde », le grand amour de sa vie. Rien ne semble lier Léo à la jeune Alma. Et pourtant, un voyage à travers le temps et les continents unira leurs destins. 
L’Histoire de l’Amour
Un film de Radu Mihaileanu. Avec Derek Jacobi, Sophie Nélisse, Gemma Arterton et Elliott Gould.
Durée : 2h14
Sortie : 16 novembre 2016


[Source : www.cclj.be]

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