Pour la 70e édition du Festival de Cannes (17-28 mai), Cristian Mungiu va présider le jury de la Cinéfondation et des Courts Métrages, après avoir siégé au jury de Steven Spielberg en 2013. Réalisateur, scénariste et producteur, il succède dans ce rôle à Naomi Kawase, Abderrahmane Sissako, Abbas Kiarostami ou Jane Campion.
Représentant éminent de la Nouvelle Vague roumaine, Cristian Mungiu partage avec le Festival une longue et brillante histoire. Après la Palme pour son deuxième film coup-de-poing, 4 mois, 3 semaines, 2 jours, il a reçu les Prix du scénario et de l’interprétation féminine pour Au-delà des collines et celui de la mise en scène pour Baccalauréat.
Si la filmographie de ce cinéaste exigeant et engagé est ainsi saluée par des jurys successifs, c’est qu’elle porte avec force sur la société roumaine un regard aigu aux résonances universelles. Ses œuvres ambitieuses examinent au scalpel la nature humaine avec une rare intelligence : satire tendre du rêve d’ailleurs de jeunes Roumains dans l’après-communisme (Occident, 2002) ; récit glaçant d’un avortement clandestin dans une petite ville (4 mois, 3 semaines, 2 jours, 2007) ; légendes urbaines surréalistes et pince-sans-rire sur le système Ceauşescu (Contes de l’âge d’or, 2009) ; exorcisme sur fond d’intégrisme religieux et d’héritage communiste (Au-delà des collines, 2012) ; conte moral sur les compromissions et la corruption dans la société roumaine (Baccalauréat, 2016).
Né en 1968 à Iași, Cristian Mungiu travaille d’abord comme journaliste et enseignant après des études de Lettres anglaises. Puis il intègre l’Académie du Film et du Théâtre à Bucarest, où il tourne plusieurs courts métrages. Il poursuit sa formation en tant qu’assistant-réalisateur auprès de Bertrand Tavernier pour Capitaine Conan (1996) et Radu Mihăileanu pour Train de vie (1998). Son premier long métrage, Occident, est sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs en 2002 et triomphe en Roumanie.
Depuis, de film en film, Cristian Mungiu creuse un sillon singulier qui allie nécessité intérieure et réflexion sociale. Il livre une grammaire cinématographique magistrale : scénario percutant d’une captivante complexité, narration tendue qui flirte avec le thriller, plans-séquences d’une fascinante austérité laissent toujours sous le choc. Sans compromis, le cinéaste n’en oublie pas pour autant l’humour, la dérision et un sens très Mitteleuropa de l’absurde.
« Cristian Mungiu fait glorieusement partie de cette école roumaine que Thierry Frémaux a mise en valeur dès les années 2000, précise Gilles Jacob, président de la Cinéfondation. Il suffit de voir l’intelligence et les ramifications interactives d’un scénario comme Baccalauréat, pour reconnaître que Cristian est l’examinateur rêvé pour faire passer le bac du Festival, c’est-à-dire la Cinéfondation et les courts métrages. Comme titrait le grand Dreyer dans un de ses courts, en 48 : Ils attrapèrent le bac… Bonne chance aux candidats ! ».
De son côté, Cristian Mungiu a partagé sa première réaction : « Reconnaître la valeur, l’originalité, dans le cinéma n’a jamais été facile. Reconnaître la valeur de très jeunes cinéastes, c’est encore plus difficile. Mais la Cinéfondation est connue pour avoir réussi à le faire avec grande efficacité. La Cinéfondation a toujours donné aux jeunes cinéastes l’aide et la reconnaissance dont ils avaient besoin en tout début de carrière afin qu’ils s’expriment avec courage et qu’ils puissent trouver leur voix. Je souhaite que ça continue pendant longtemps avec la même efficacité et je suis fier d’être associé à cette démarche. »
[Photo : Dan Beleiu - source : www.festival-cannes.com]
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