sexta-feira, 24 de agosto de 2018

Horacio Castellanos Moya, une Comédie humaine en Amérique latine

Le romancier Horacio Castellanos Moya a fait une rentrée fracassante avec son nouveau livre, Moronga, publié aux éditions Métailié. Sans se tromper, la maison le présente comme l’une des voix les plus puissantes de la littérature latino-américaine. Et à ce titre, vient de racheter l’ensemble des droits sur ses livres.



Écrit par Nicolas Gary 

Originellement traduit par Les Allusifs, l’auteur salvadorien avait quitté la maison à la suite des mésaventures éditoriales. Celle-ci avait connu une faillite, déclarée en octobre 2012, et, malgré un redressement l’année suivante, plusieurs auteurs étaient partis. 

Parmi eux, Horacio Castellanos Moya, dont les éditions Métailié avaient déjà republié deux titres en janvier 2013 et septembre 2015, La servante et le catcheur et Le rêve du retour (traduction René Solis). « Horacio avait apprécié la manière dont nous avions travaillé avec lui pour La servante, que l’on avait lu ses livres... en somme, que nous étions de véritables éditeurs », indique Anne-Marie Métailié à ActuaLitté.

« Sensibles aux malheurs qu’ont connus Les Allusifs, nous avons choisi de reprendre ses romans. » De fait, après avoir fait deux achats de droits, le romancier annonce qu’il est passé dans l’agence d’Andrew Wylie, réputée pour sa pugnacité dans les négociations. La volonté était alors affirmée que de relancer l’ensemble de son œuvre, sur plusieurs territoires. « Un grand auteur comme lui, s’appréhende mieux encore avec une vision globale », reconnaît l’éditrice française. 

Et de fait, l’agence Wylie est parvenue à vendre l’œuvre dans sa globalité dans plusieurs pays – notamment à Random House pour l’Espagne, une vision autant qu’une reconnaissance...

Mais pas question de céder aux méthodes de l’américain : l’affaire est strictement négociée, et appuyée par l’auteur qui connaît déjà le travail effectué sur ses précédents livres par la maison. Tous les titres précédemment parus sont repris, certains avec une traduction réactualisée, d’autres avec la traduction originelle produite par les Allusifs, « parce qu’elle était impeccable », note Anne-Marie Métailié. 



 
Un programme de publication sur trois ans est décidé, avec Effondrement et Le dégoût dans la collection Suites, à venir en 2018. À mesure toute l’œuvre sera rééditée, il s'agit de rendre cette cohérence qui s’observe à travers chaque roman. « Ses personnages circulent dans les livres, se retrouvent, s’observent. Certains entretiennent des liens de parenté d’ailleurs. » 

Le petit-fils de La servante et le catcheur se révèle ainsi être le protagoniste de Moronga, ancien guérillero salvadorien, qui a fui son pays pour l’Amérique. De même, l’antihéros du Bal des vipères se retrouve dans La servante et le catcheur : observé, alors qu’il est dans sa voiture avec ses serpents, il fait une apparition remarquée.

Mais les interactions sont bien plus nombreuses, avec une forme de convergence vers Moronga, où plusieurs protagonistes refont une apparition, venus de la quasi-totalité de ses précédents romans. 

Pour son éditrice, « c’est une Comédie humaine, dans ce qu’elle pourra avoir de typiquement balzacien, à travers toutes ces articulations. En réalité, ses livres sont un grand panorama de la survie dans des pays ravagés par la violence des régimes politiques ».

Perpétuel exilé qui ne cesse de raconter l’histoire de son pays, Moya a ainsi bâti la saga des Aragón : bourgeoises hystériques, paranoïaques irascibles, alcooliques invétérés, hommes d’action sans morale : voici quelques-uns des types qui peuplent son univers. 

Et plus il s’en éloigne, plus il revient sur cette guerre civile désastreuse au Salvador qui a duré douze ans et fait 100 000 morts. Au fil des ans, Horacio Castellanos Moya a échafaudé l’histoire d’une famille salvadorienne sur fond de bouleversements politiques intenses, de 1948 à nos jours. D’un roman à l’autre, les figurants deviennent les héros, dans un réseau serré d’intrigues indépendantes reliées par des personnages à bout de nerfs. 

Actuellement en Suède, on attend avec impatience son retour en France. De Moya, Roberto Bolaño disait que « son humour acide est une menace pour la stabilité hormonale des imbéciles, qui en le lisant ressentent un irrépressible besoin de le pendre en place publique ». Avec sa dernière publication, il est assurément au sommet de son œuvre. « Implacable, corrosif et drôle », assure la maison. À raison...

Horacio Castelanos Moya - trad. espagnol (Salvador) René Solis – Moronga – Métailié – 9791022607940 – 22 €


[Photo : Éditions Métailié - source : www.actualitte.com]

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