sexta-feira, 19 de janeiro de 2018

Scoop



Par Bertrand Mathieux 

Film de Woody Allen
Année de sortie : 2006
Pays : États-Unis, Royaume Uni
Scénario : Woody Allen
Photographie : Remi Adefarasin
Montage : Alisa Lepselter
Avec : Scarlett Johansson, Hugh Jackman, Woody Allen, Ian McShane

Sondra Pransky: Do you have a family?
Sid Waterman: I had a wife but sh… she dumped me if you can believe that.
Sondra Pransky: Somehow…
Sid Waterman: She thought I was immature and that I never grew up… I had a great rebuttal for her, I coulda nailed her, you know, but uh… I raised my hand, she would not call on me.
Pour son second long-métrage tourné en Grande-Bretagne, Woody Allen concocte une comédie policière taillée sur mesure pour lui et sa partenaire Scarlett Johansson. Leur savoureux tandem illumine ce film léger, drôle et sans fausse note.
Synopsis de Scoop
Sondra Pransky (Scarlett Johansson), une étudiante en journalisme américaine, se rend, au cours de ses vacances à Londres, à un spectacle de magie donné par Sid Waterman (Woody Allen), dont le nom de scène est « The Great Splendini ». Appelée sur scène, la jeune femme entre dans le « dématérialiseur » pour les besoins d’un tour. Tandis qu’elle attend à l’intérieur de l’engin, le fantôme d’un célèbre journaliste apparaît et lui révèle l’identité du « tueur aux tarots », un assassin qui défraie la chronique à Londres ; il s’agirait de Peter Lyman (Hugh Jackman), un jeune et riche aristocrate anglais.
Sondra décide de mener son enquête et parvient à convaincre Sid de lui prêter main forte. Ce tandem maladroit s’engage dans une aventure rocambolesque…
Critique du film
La période anglaise de Woody Allen
Il est amusant de constater que les trois films tournés par Woody Allen en Angleterre entre 2005 et 2007 sont certes différents mais empruntent chacun au genre policier, ce qui n’est pas si courant que cela chez le réalisateur et scénariste new-yorkais. Le premier d’entre eux, Match Point – qui constitua une étape assez importante dans sa filmographie puisqu’il s’agit de son premier film tourné hors des États-Unis et aussi d’une œuvre plus sombre que celles qu’il réalisait à l’époque -, peut être considéré comme une variation anglaise de Crimes et délits, ces deux films explorant le thème du mal, du hasard, de la culpabilité et de la morale. Thématique que l’on retrouve d’ailleurs dans Le Rêve de Cassandre, sur lequel s’acheva une escapade cinématographique britannique décidément placée sous le signe du crime.
Entre ces deux films graves dont les protagonistes, meurtriers d’un jour, sont confrontés à des dilemmes moraux douloureux, Scoop apparaît comme une bulle aérienne, à la légèreté communicative. S’il fallait lui chercher un équivalent dans la filmographie de son auteur, ce serait vers Meurtre mystérieux à Manhattan (1993) qu’il faudrait se tourner, lequel met également en scène une paire de détectives en herbe enquêtant maladroitement sur un individu suspect (incarné ici par Hugh Jackman).
Scarlett Johansson et Hugh Jackman dans "Scoop"
Scarlett Johansson et Hugh Jackman dans « Scoop »

Un hommage au journalisme d’investigation

Le film démarre avec le personnage de Joe Strombel (Ian McShane), un journaliste décédé si impliqué dans l’investigation qu’il menait avant de mourir qu’il décide de tromper la vigilance de la mort (représentée d’une manière relativement similaire à celle qu’Allen avait déjà adoptée dans Guerre et Amour) pour aller communiquer à l’inexpérimentée Sondra Pransky (Scarlett Johansson) le fruit de ses recherches. Comme Woody Allen le déclara lui-même dans une interview (lire Woody Allen Interview on his new movie Scoop), ce point de départ fantastique visait à rendre hommage – à travers la ténacité posthume dont témoigne Strombel dans le film – au journalisme d’investigation, que le cinéma américain a d’ailleurs mis à l’honneur dans nombre de ses classiques et qui, à en croire certains, est plus que jamais en voie de disparition.

Un duo qui fait mouche

Un an après Match Point, Allen retrouve ici Scarlett Johansson à laquelle il donne l’opportunité de composer dans un registre radicalement différent, l’actrice passant d’une torride femme fatale à une journaliste débutante vaguement crédule (un peu gourde par moment) et plutôt drôle, parfois à son insu. Il a d’ailleurs écrit le rôle de Sondra pour elle, impressionné par sa prestation dans Match Point, et ceci alors qu’il songe – de son propre aveu – rarement à un acteur particulier au moment de l’élaboration d’un scénario.
Affublée d’une paire de lunettes, flanquée d’un appareil dentaire et vêtue de tenues décontractées, la comédienne est rayonnante – rien de plus charmant, souvent, que la beauté qui ne force pas la note. Au niveau du jeu, elle exécute une partition légère et comique, très éloignée du timbre grave et lascif dont elle usait dans Match Point. Sa complémentarité avec Woody Allen – toujours aussi parfait dans un numéro dont il connaît par cœur les moindres subtilités – est flagrante, et leur duo pittoresque (basé essentiellement sur des oppositions, comme souvent dans les duos comiques) fonctionne à merveille, aussi bien que celui que le réalisateur composait avec Diane Keaton dans Meurtre mystérieux à Manhattan (le cousin new-yorkais de Scoop évoqué ci-avant).
C’est un vrai plaisir de voir ces deux comédiens échanger des répliques écrites au cordeau, et il y a fort à parier que leur entente dépasse le seul cadre de la fiction (elle est devenue une amie, a déclaré le metteur en scène dans une interview) ; ce que tend d’ailleurs à confirmer le fait que le cinéaste dirigera sa jolie partenaire dans un troisième film, sous le ciel catalan cette fois, à savoir le lumineux Vicky Cristina Barcelona.
Scarlett Johansson dans "Scoop"
Scarlett Johansson dans « Scoop »

Ce légendaire « sens du swing »

L’une des particularités de la plupart des films d’Allen – qui, rappelons-le, joue de la clarinette dans un orchestre de jazz – est ce swing infaillible au rythme duquel les séquences s’enchaînent, avec une aisance et une fluidité déconcertantes. Il fait partie de ces metteurs en scène qui maîtrisent si bien les rouages de leur cinéma que tout semble se mettre en place avec un naturel confondant, une précision instantanée. Chaque plan, chaque intonation et chaque réplique sonne juste : il n’y a pas une lourdeur, pas une approximation ; Scoop est aussi simple et efficace que le court vocable qui compose son titre.
La photographie de Remi Adefarasin (qui avait déjà collaboré avec Woody Allen sur Match Point) achève de donner au film, par le biais de teintes chaudes et colorées, une atmosphère confortable, qui berce le spectateur au fil d’un récit rythmé et plein d’insousciance.
Quant à Hugh Jackman (vu récemment dans l’excellent Prisoners), il est convaincant en aristocrate séducteur, quoique nettement en retrait par rapport au couple vedette, qui rafle toutes les répliques précieuses du film.
Woody Allen dans "Scoop"
Woody Allen dans « Scoop »
8NOTE GLOBALE
Scoop est l'une des meilleures comédies que Woody Allen nous ait offert ces dernières années. Ses détracteurs diront qu'il ne prend que trop peu de risques, qu'il fait toujours le même film, etc. D'abord, Allen prouvera le contraire dès son long métrage suivant, Le Rêve de Cassandre. Ensuite, même quand il applique plus ou moins la même recette d'un film à l'autre, sa justesse d'exécution, son entrain et aussi le talent de ses partenaires à l'écran font que le résultat est souvent un réjouissant moment de cinéma ; or Scoop, à l'inverse de films comme Annie Hall par exemple (l'un des chefs d’œuvre de son auteur), n'a aucunement l'ambition d'être autre chose que cela - et c'est aussi ce qui contribue à son charme.

[Source : www.citizenpoulpe.com]

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