Google affronte les autorités espagnoles sur la protection des données devant la Cour de justice de l’Union européenne mardi (26 février). Cette affaire concerne le monde entier et soulève l’une des questions les plus difficiles à propos de l’ère de l’Internet : quand l’information est-elle réellement privée ?
L'affaire devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) se résume à ceci : si une personne ne paie pas ses cotisations à la sécurité sociale et que sa maison est mise en vente aux enchères en conséquence, a-t-elle le droit de contraindre Google à effacer cette information nuisible des résultats de recherche ?
Derrière cette question se cachent des arguments complexes sur la liberté de l'information, le droit à la protection des données, les conséquences d’être un éditeur et sur l’identité des gardiens de l'Internet en fin de compte.
Google affirme qu'il n'a pas vocation à faire disparaître des contenus légaux qu'il n'a pas créés de son index de recherche gigantesque.
Des autorités espagnoles affirment que Google doit effacer les informations de son index dès lors qu'elles mettent en jeu le respect de la vie privée.
À la suite de l'audition de mardi devant la Cour au Luxembourg, un avocat général de la CJUE publiera un avis sur la question le 25 juin. Les magistrats ne devraient pas statuer avant la fin de l'année.
L'affaire se fonde sur une plainte d'un Espagnol qui a fait une recherche sur son nom dans Google. Il y a découvert une information de presse vieille de plusieurs années, relatant la mise en vente aux enchères d'un bien lui appartenant, en raison du non-paiement de ses cotisations à la sécurité sociale.
L'une des juridictions supérieures de l'Espagne, l'Audiencia Nacional, a fait droit à sa plainte et a jugé que Google devait effacer cette information des résultats de recherche. Puisque Google a décidé de contester cette décision, l'Agence espagnole de protection des données a porté l'affaire devant la Cour de justice de l'UE en mars 2012.
Contrôleur ou réceptacle ?
Sur son blog mardi, Google estime qu'il y a « des raisons sociétales évidentes pour lesquelles ce genre d'information devrait être disponible pour le public ».
L'annonce de la mise aux enchères d'un bien était « nécessaire dans le cadre du droit espagnol et contient des informations correctes d'un point de vue factuel, qui sont toujours disponibles sur le site web du journal », a déclaré William Echikson, responsable chez Google de la liberté d'expression pour l'Europe, l'Afrique et le Proche-Orient.
Les partisans du moteur de recherche font valoir que si l'obligation d'effacer ce genre d'information devait être retenue, cela créerait un précédent ouvrant la porte au retrait de toute une série d'informations pour des raisons spécieuses, ce qui rendrait Google le principal responsable.
La cour de justice de l'UE essayera de déterminer si Google peut être considéré comme le « contrôleur » ou simplement un réceptacle de ce type d'information. Elle devra en outre dire si un moteur de recherche basé en Californie, tel que Google, peut être soumis aux lois européennes sur la vie privée.
Selon l'autorité espagnole de réglementation des données, les magistrats de la CJUE doivent examiner si les citoyens européens sont contraints de se rendre devant les tribunaux américains pour faire valoir leurs droits à la vie privée et si Google « est responsable des dommages que la diffusion d'informations personnelles peut causer aux citoyens ».
Cette affaire pourrait déterminer la portée d'un projet de loi de l'UE qui vise à renforcer la vie privée des citoyens. Le Parlement européen débat en ce moment de règles proposées par la Commission européenne en 2012. Ce texte accorderait aux citoyens un « droit à l'oubli », c'est-à-dire le droit à l'effacement de ses données personnelles, en particulier sur Internet.
Des spécialistes de l'Internet soulignent que la liberté d'expression pourrait pâtir d'un tel principe s'il venait à être inscrit dans le droit européen.
L'Espagne, qui dénombre plus de 180 affaires semblables, a renvoyé l'affaire devant la plus haute cour de l'UE afin de préciser la manière d'appliquer le projet de loi de l'UE, principalement par rapport à Google.
Madrid a indiqué que le résultat de l'audience serait pertinent non seulement pour l'Espagne, mais également pour tous les États membres de l'UE.
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